Âge: 35 ans Origines: indiennes de par sa mère, même si elle est née en Écosse Occupation: femme de main du syndicat, principalement du Sanhéhul. Elle agit selon les besoins : gros bras, portière, recouvreuse de fonds, escorte pour les filles du bordel…  Orientation sexuelle: contratsexuelle, mais on lui connaît des mœurs légères, aveugles Statut civil: célibataire désintéressée Clan: techniquement, le crime organisé Traits de caractère: cupide, fiable, organisée, arrogante, sarcastique, effrontée, audacieuse, débrouillarde, indépendante, menteuse, salace. Groupe: améliorés.

Quels sont les points forts de votre personnage: Hannah a pour maîtresse la polyvalence. Elle flirte avec les nombreux aspects qu’impliquent son emploi avec une sensualité toute féminine, même si l’ensemble de ses tâches relève d’une sphère autrement masculine. Aussi discrète qu’audacieuse, elle exécute ses ordres avec un raffinement et une débrouillardise dont elle seule a le secret. Peut-être que ses vagues talents de manipulation – sans les remords qui viennent avec le fait de mentir, gracieuseté de son nouveau système nerveux – ont à voir avec son taux de réussite impressionnant. Elle satisfait son employeur, obtient son dû, ne remet pas ses ordres en doute – et c’est sans doute pourquoi elle est toujours en vie. Le ghetto a formé son cœur autant que son corps pour faire d’elle une combattante douée et agile qui n’a pas peur de s’attirer la colère d’un colosse. Elle tire une grande fierté – déplacée, sans doute – de son travail et de son profil atypique.
Et ses faiblesses ? Si elle était autrefois colérique, elle s’est adoucie, passant de dangereusement belliqueuse à jeune femme moqueuse au rire sardonique en proie à l’occasionnel élan de frustration. Or, pour certains, il ne s’agit pas d’une force. Elle ne ressent ni douleur, ni pitié, aucun mal physique ou mental ne semble la torturer plus de quelques brefs instants. Ses capacités chirurgicalement acquises la rendent trop casse-cou et elle prend trop souvent des risques inutiles. Toutefois, sa plus grande faiblesse reste sa cupidité sans égal. Jusqu’à maintenant, le « salaire » que lui paie le syndicat lui suffit. Aurait-elle l’audace de tourner le dos à son employeur actuel si elle venait à avoir une offre plus alléchante? La réponse est simple, monosyllabique : oui. Toute améliorée qu’elle est, elle n’en reste pas moins humaine physiquement et susceptible à ce que ça encourt : maladies, blessures… mort. La chair est l’une de ses faiblesses à un autre niveau; elle s’attache trop souvent à d’autres corps de manière temporaire, jusqu’à se lasser, jusqu’à lasser l’autre, et la distraction causée par une jolie créature peut se révéler désastreuse.
A-t-il été amélioré ? Le syndicat a cru bon de la pourvoir de certaines améliorations, avec son consentement, afin qu’elle puisse mieux exécuter ses tâches. Hana est dotée de l’implant MUXL, qui frétille constamment sous sa peau en autant de DEL aux lueurs froides. Entièrement assimilé à son système – après une certaine crainte d’un rejet – il clignote sous son épiderme, tantôt bleu, tantôt violet. Par la même occasion, le syndicat a indiqué au protochirurgien de lui retirer sa puce standard, mais elle ignore ce détail. L’amélioration la rend insensible aux douleurs physiques et a quelque peu engourdi ses sentiments, si bien qu’elle ne ressent que de vagues souffles d’émotions éphémères.
Est-il familier avec la Matrice ? Aucunement. Sa vie à elle, c’est dans le ghetto et nulle part ailleurs.
Suivrait-il des rumeurs ? Absolument – déformation professionnelle, sans doute. Elle a appris à se laisser porter par les bavardages de la rue, les potins du ghetto, et l’habitude fait en sorte qu’elle sait assez bien déceler le plausible de l’improbable.
Quel est le rapport de votre personnage à la résistance ? Elle n’en a strictement rien à faire, puisqu’elle n’en a jamais réellement rencontré – ou du moins, pas assez longtemps pour qu’ils puissent lui faire leur speech à saveur politique.

FIN 2010 Hannah naît, extirpée chirurgicalement du ventre de sa mère en raison de complications. Quelle idée d’avoir un gosse une poignée de lunes après un si terrible krach? Une erreur. Un accident. Une étudiante aux finances précaires qui accepte l’invitation d’un homme d’affaires qui semble conserver sa dignité malgré le débâcle. Une soirée, une nuit, et neuf mois plus tard, elle hérite d’un parasite hurlant. Le père? Inconnu au bataillon. Il ne s’est plus jamais manifesté. 2026 Elle a seize ans et elle vote pour la première fois; pas pour la moindre des causes, d’ailleurs. Elle contribue à l’indépendance de l’Écosse, tout comme cette année elle clame sa propre indépendance. Elle quitte le nid familial, laisse sa mère derrière, s’installant dans un appartement insalubre. Son appartement. Le jour de son départ marque la dernière fois qu’elle verra sa génitrice... ou du moins, elle l’espère. 2033 Le ghetto nouvellement déclaré l’avantage presque. Plutôt que de payer un loyer, elle échange son temps, discutant avec le vieillard qui « possède » l’immeuble, cuisine, range. À vrai dire, plus personne n’a rien dans ces catacombes pestilentielles. Il ne reste au vieux que quelques mois à vivre, au plus; la pollution, l’air vicié et l’insalubrité auront rapidement raison de sa santé fragile. 2035 La mise en place d’une armée privée du Conglomérat fait vite les manchettes et Hannah s’y engage, persuadée que son tempérament bouillant sera chaudement accueilli dans les rangs militaires. L’entraînement est rude, sans relâche, mais sa bonne forme et son jeune âge en font une recrue prometteuse. 2038 Trois ans dévoués à l’armée, envolés en fumée : mise à la porte avec un coup de pied au cul et de mauvaises références pour insubordination, voies de fait sur un officier supérieur et méfaits. Repérée par le Syndicat, qui, en échange de ses services, lui offre une amélioration protochirurgicale et une compensation alléchante, il n’en fallait pas plus pour qu’Hannah signe (métaphoriquement). Une longue et douloureuse convalescence l’attend à la suite de la pose de son implant MUXL, mais les résultats qu’elle offre à ses employeurs semblent indiquer qu’elle en valait la peine. 2040 On frappe à sa porte – une gamine, une messagère du syndicat. Sa mère est à l’article de la mort après une explosion accidentelle dans le laboratoire où elle était employée de maintenance. À son chevet, Hannah ne trouve rien à dire. « Dis salut à baap de ma part, ammi. » Elle ne ressent ni tristesse, ni regret, ni mélancolie – l’implant est réellement aussi puissant que prescrit. Ça fait d’elle un monstre, contraire à ce que sa mère aurait voulu. Mais ça lui plaît, pour l’instant. 2045 Le plafond de son squat s’effondre et elle est forcée de se relocaliser. Elle profite de l’occasion pour se rapprocher de son lieu de travail; elle s’établit à Old Town, d’où elle a une vue imprenable sur l’entrée des fumoirs. L’endroit est dans un état plus qu’acceptable, sinon une tache de sang incrustée dans un vieux plancher en bois, qu’elle a prestement recouverte d’un tapis rongé par les mites. Elle préfère ne pas demander comment son employeur a pu lui dénicher un endroit pareil en si peu de temps. 2046 Business as usual. Le ghetto croule un peu plus chaque jour, autant moralement que physiquement, le sang coule, la pierre s’écroule. Ce genre de climat rend son travail lucratif à sa façon – et puis, elle manque d’émotions pour ressentir le moindre dégoût quant à ses conditions de vie. Pour le meilleur et pour le pire.

Le médicastre du dimanche l’ausculte avec intérêt, lâchant des « hmm » et des « ooh » à brûle-pourpoint. Hannah se tait, immobile, peu indisposée par le fait de se retrouver en sous-vêtements devant un inconnu terré au fond d’un trou crasseux qui lui sert de clinique improvisée. « C’est moche », qu’il finit par lâcher dans un soupir. En guise de réponse, les diodes lumineuses enfouies sous l’épiderme de la belliqueuse pulsent doucement. « Ah. » Elle ne sent rien, sinon un inconfort prévisible. Ses employeurs avaient fait régler son implant nerveux à des paramètres, selon eux, « parfaits » : elle ne ressentirait pratiquement aucune douleur, jusqu’à ce que celle-ci soit nécessaire pour sa survie – pour déclencher l’instinct primaire de l’humain, celui de fuir et de demander de l’aide. Elle était agile, furtive. Un rat dans la pénombre. Elle observe avec intérêt le toubib alors qu’il réalise le huitième point de suture sur la paume de sa main gauche. Il ne sait par où commencer – la main, fendue d’un bord à l’autre? Les deux côtes cassées qui bossellent la peau hâlée de son abdomen, menaçant de s’en échapper? Le visage fêlé, l’arcade sourcilière brisée, le nez crochu? –, alors il s’attarde à la main sanguinolente posée sur un vieux bout de tissu sale, pour le confort de la patiente. « C’est à se demander comment tu t’es fait ça. »

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« C’est l’heure, Ilora. » La voix de l’Indienne est sans appel. La prostituée frémit, comme surprise par l’ordre, mais obtempère, ramassant les quelques effets qu’elle avait délaissés dans un coin de la pièce. Personne ne lui avait demandé de ramener la fille chez elle – Hannah le faisait par bonté de cœur, si on veut. La gamine était à peine majeure, belle à croquer, et s’était déjà fait remarquer par un petit groupe de voyous qui la suivait le soir venu, lorsqu’elle tentait de rentrer chez elle. Trois nuits qu’elle avait passées à dormir au bordel, squattant n’importe quel lit inutilisé, dans laquelle l’odeur fétide de parfum bon marché et d’opium restait constamment imprégnée. Ce n’était pas la pitié qui dictait les gestes de la portière, mais plutôt le sentiment que c’est ce qu’elle aurait fait lorsqu’elle avait encore une conscience. La route est sombre; les bruits du ghetto, qu’Hannah a apprivoisés comme autant de pigeons sauvages, terrorisent pourtant la blonde qui enchaîne les petites foulées pour rattraper les grands pas rapides de son escorte. « Par là. »

Hannah suit, docile animal. Elle attend d’entendre le bruit sec du verrou, signe qu’Ilora s’est bien cadenassée chez elle, en sûreté – pour l’instant. La protectrice prend une ruelle, puis une autre, tombant par hasard sur trois gamins de tout au plus 20 ans. « Hey, ça t’amuse d’nous empêcher de voir la jolie Ilora d’plus près? » Elle s’arrête, toisant les racailles; son visage marmoréen ne traduit qu’une neutralité presque déroutante. Elle ne répond pas et continue d’avancer, scindant le petit groupe en deux en le traversant. Une main se pose sur son épaule et elle se retourne, s’arrêtant à nouveau pour darder ses prunelles d’onyx sur le jeune homme. « Ôte ça de là. » Il étouffe un rire; son autre main, fermée en un poing serré, s’abat sur la tempe de la demoiselle, qui laisse venir le coup sans broncher. La femme ne cille même pas lorsque la main nue réitère dans un assaut qui lui fend l’arcade sourcilière. Stoïque, un sourire lui échappe alors qu’elle mordille doucement sa lèvre, les yeux rivés sur son agresseur. « C’est tout? » qu’elle le provoque, la voix rauque, presque sensuelle. Le plus gros des trois profite de la distraction de son compère pour se ruer sur elle – Hannah l’évite sans effort, l’ayant vu venir largement d’avance. Elle décroche le bâton télescopique qui pend à sa taille et le déploie d’un coup de poignet habitué. Ce n’est pas son premier rodéo, et ses adversaires le réalisent seulement maintenant, alors qu’elle donne un coup sec en pleine trachée du porc qui l’a chargée.
Le second s’avance, faisant tournoyer un couteau papillon entre ses doigts. Hannah s’approche d’un pas vif; les clics réguliers du couteau s’arrêtent brusquement. Le regard horrifié, l’assaillant observe d’abord le visage de celle qu’il pensait rapidement mettre à terre, puis la main gauche ensanglantée de cette dernière, ses doigts refermés sur la lame. Il est désarmé, alors qu’elle vient d’hériter d’un chouette surin. Elle lance l’arme au loin. Le dernier des voyous prend la fuite, la laissant avec les deux molosses tétanisés qui reprennent leur assaut, cette fois de concert.

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« T’es vachement curieux pour un mec qui doit sa vie au fait que ses clients sont du genre discret », qu’elle réplique du tac au tac, haussant un sourcil. « Prêche par l’exemple. » Sa façon polie de lui dire ta gueule. Oh, elle ne s’en était pas sortie indemne, c’est certain. Mais elle adorait voir l’expression de surprise, d’incompréhension dans le visage des gens lorsqu’ils réalisaient enfin qu’aucune des souffrances qu’ils lui infligeaient ne la torturait. Au contraire; le chatouillis, le frétillement de sentir la pression de jointures contre sa cage thoracique sans en ressentir le mal l’excitait presque. Une excitation qu’elle n’avait jamais ressentie auparavant, lorsqu’elle était… normale. À l’exception du moment où elle avait refait le portrait de son supérieur immédiat dans l’armée. L’apogée de son existence fade. Le dernier moment où elle s’était sentie humaine.