Hannah prend place entre deux badauds du syndicat dans les gradins, les poussant avec peu de douceur afin qu’ils lui laissent davantage de place. Il faisait déjà chaud, pas la peine de faire pire en restant nichée entre deux armoires à glace qui faisaient largement quelques têtes de plus qu’elle, même assises. Un foulard recouvre sa chevelure ainsi que le bas de son visage; elle connaissait le principe de l’événement et s’imaginait fort bien qu’elle recevrait en pleine poire une dose copieuse de poussière d’ici la fin de la course.
Pourquoi elle était là? Bonne question, dont la réponse pouvait aisément se résumer à « rien de mieux à faire ». Oh, bien sûr, elle avait quelques demandes à clôturer par-ci, par-là, mais rien d’urgent, surtout considérant que la plupart des cibles de ces contrats seraient des spectateurs de ce tour de piste barbare. Elle avait le droit d’emprunter une moto à ses employeurs lorsqu’elle en avait besoin, mais elle avait toujours trouvé que ses capacités lui permettaient de se déplacer plus vite qu’à travers les ghettos sur un cheval d’acier.

Elle jette un coup d’œil à la ligne de départ, où elle reconnaît certains visages. « Schwarzberg », qu’elle marmonne dans un rictus sauvage. « Celui qui réussit à m’en débarrasser risque de gagner une nouvelle admiratrice pas si secrète. » L’un des gros bras qui la flanquent étouffe un rire, auquel elle répond d’un coup de coude bien placé dans les côtes. Elle seule avait le droit de dire du mal d’Adelaïde. Or, force est de constater qu’elle mène, la bougresse. Hannah pince les lèvres, contrariée de voir son ancienne commandante dominer ainsi le circuit. Si seulement son bolide pouvait exploser, tout le monde n’en serait que plus tranquille.

Les jeux de mort n'attirent pas Avalon en principe. Elle trouve ça au combien barbare de s'entre tuer juste pour le plaisir du spectacle. On se croirait presque revenu dans cette lointaine époque décrite dans les livres d'histoire qu'on peut trouver sous un tas de poussière : l'époque Romaine. Tout n'était que sang et poussière entre esclavage et combat de gladiateur dans les arènes. Ceci n'était ni plus, ni moins, la version moderne d'une arène de gladiateur. A la seule différence, l'empereur n'était pas là pour assister à ce "somptueux" massacre. Les gradins allaient uniquement être remplis de personnes avides de violence, ayant soif de sang et d'horreur. Alors, pourquoi Ava est là, si elle ne cautionne pas ce genre d'évènement ? En tant que Blade Runner, elle trouve ça logique de venir, ne serait-ce que pour trouver une cible. Les choses pourraient tellement vite dégénérer ici. Peut-être qu'elle veut protéger l'honneur des mutants, les sauver d'eux même. C'est compliqué... A moins qu'elle ne soit là que pour aider, pensant que son pouvoir, bien qu'il puisse la tuer, pourra venir en aide à quelqu'un. Dans le fond, c'est uniquement une curiosité malsaine qui l'a poussé à venir. Qu'importe, elle descend les gradins, ne se sentant pas à sa place, mais ne le faisant jamais paraitre. Son visage reste serein, montrer une faiblesse c'est signer son arrêt de mort dans ce monde incertain.

Ses pieds dévalent les marches et enfin elle localise une place libre. Avec aisance et rapidité, elle se faufile devant les gens pour y parvenir. C'est là qu'un petit malin commença à approcher ses mains de manière un peu trop dangereuse. Son regard se focalisa alors sur lui pour lui lancer de manière cinglante : "Fait gaffe ou tu mets tes mains si tu veux pas que je les brises et que je te les fasse bouffer !" Le gars se ravisa, surprit par une réponse si violente qui faisant planer un semblant de vérité. Ava continua sa route et prit place, derrière elle se trouvait une femme entourée de deux hommes, elle ne la connaissait pas, mais ne trouvait pas étonnant que d'autres femmes puissent vouloir assister à ça.