Dans le monde qui était le leur, le nerf de la guerre, c'était plus vraiment l'argent, mais la bouffe. Il n'était donc pas rare que Godfred reçoive ce genre de "commande" des groupes qui se servaient des Pirates comme de sous-traitants. Dernièrement, il en avait lorgné une avec un rien d'intérêt, et avait été présenter à Bogdan son idée de l'exécuter parce que les gars (une branche du Syndicat) payaient bien, et que rendre service à ce genre de types était toujours une bonne idée, on ne savait quand on aurait besoin d'un retour d'ascenseur.
Décision avait donc été prise de trouver un convoi qui transporterait de la nourriture, de le bloquer dans les environs de la ville, de préférence dans les déserts non fréquentés qui ceinturaient Edimburg, et de le piller. Les Pirates avaient une unité spécialisée dans le détournement de convois, que God surnommait affectueusement « les voltigeurs » – c'était l'unité qu'il commandait le plus régulièrement.
Les voltigeurs étaient en petit nombre comparés aux brutes épaisses qui étaient sous le commandement de Bog, et ils étaient montés sur les véhicules les plus rapides des Pirates – leur technique, plus que l'abordage pur et simple et la confrontation frontale, était d'harceler les convois et les mener là où ils le voulaient, en terrain dégagé et avantageux pour le reste des Pirates. Bref, tout à fait le style de Godfred, qui préparait l'offensive menée par Bogdan pour mettre toutes les chances de leur côté.
Les éclaireurs des Pirates avaient donc été envoyés pour trouver un convoi suffisamment intéressant pour y faire intervenir toute la troupe, et Godfred avait entamé son jeûne avec un ascétisme admirable.
Dax était revenu quelques temps plus tard avec la bonne nouvelle, et c'était ainsi qu'en un beau début d'après-midi, God était installé sur sa moto dont il faisait ronfler le moteur, sous le regard appréciateur du doigts-noirs qui s'en était occupé. (Il appréciait la moto, pas God dessus, on se calme.)
Il eut un hochement de tête approbateur, jeta un regard par-dessus son épaule au reste de ses voltigeurs, tous en place sur leurs motos respectives, et il enfila un bandana comme un desperado motorisé. Il donna le signal du départ à ses hommes, qui partirent tous dans la direction qu'ils avaient révisée avant leur départ ensemble, penchés sur une carte, quant à God lui-même, il s'approcha de Bogdan en roulant au pas pour lui lancer un regard joueur, le sourire de gosse caché par son bandana.
« T'as intérêt à intervenir avant qu'on se fasse défoncer mon grand. A toute, et fais gaffe à toi s'te plaît. J'aurais horreur de te ramasser en petits morceaux. »
Le second des Pirates fila du campement dans une gerbe de gravier et de poussière, faisant hurler le moteur de sa bécane pour rattraper les autres voltigeurs.
Le convoi, quant à lui, roulait tranquillement, les hommes le défendant surveillant paresseusement les rétros d'un air lassé.
Ils se redressèrent d'un coup d'un seul, inquiets, en entendant plusieurs bourdonnements de motos rapides, et froncèrent des sourcils en voyant les voltigeurs apparaître.
« Merde ! Ça s'passe mal là ! »
Godfred fit un mouvement de main vers la droite. Il fallait qu'ils emmènent le convoi vers cette direction-là. Il dégaina une arme semi-automatique, conduisant d'une seule main, et remontant le convoi en mettant les gaz.
Il tira quelques balles en l'air, faisant sursauter les occupants du convoi, et les jetant sur leurs propres armes à feu. Ils allaient se défendre, et le but des Pirates, c'était de les cornaquer vers le terrain qui les intéressaient sans qu'ils ne s'en rendent vraiment compte.
C'était donc ici que le rodéo commençait.
Godfred lâcha un cri de guerre, encourageant ses hommes.