C’était la guerre, c’était ce monde pourri qui nous mangeait chaque jour un plus de chair et de vie, c’était ce monde pour lequel on se battait sans vraiment savoir pourquoi. Surement pour obtenir notre liberté et un mieux-être. Parfois, je m’imaginais sur le bord du Lock Lomond, ou encore proche de la plage quand elle était encore déserte et habitée par la faune et la flore marine. Et d’autres fois encore je m’imaginais accompagné et relaxé par un doux massage. Les rêves sont beaux et cultivent notre espoir, mais ne sont-ils pas vains désormais ? Je commençais franchement à perdre espoir dans ce quotidien de batailles et de risques.

Après une course effrénée après un petit voleur j’abandonne finalement. A quoi ça sert ? Il a volé un livre que je venais de récupérer dans les lowlands. Un bien précieux, certes, mais tout le monde était à la recherche de divertissement et de bien-être. Une denrée si rare qu’on la perdait de vue et qu’on ne faisait finalement que survivre puisque c’est notre instinct qui nous le dicte.

Enfin essoufflé, je n’avais pas encore remarqué cette porte mais j’avais tout de même une étrange sensation. Et puis, à y réfléchir ce jeune venait juste de disparaître sous mes yeux et je ne m’inquiétais pas de ne pas entendre ses bruits de pas au loin, résultat du fracas des chaussures délabrées sur la terre sèche. Il n’y avait même pas de poussière. Non au lieu de ça, j’entendais… j’entendais le chant des mouettes ?

« Hein ? »

Je me redressai alors, cherchant l’origine de ce bruit. Etait-ce mon cerveau qui divaguait ? La fatigue me rattrapait-elle à cet instant ? Surement, il n’y avait pas de plage proche du centre et encore moins des mouettes…

Clip Clip Clip… mes yeux clignotaient alors que je venais d’atteindre l’angle d’une rue. Une double porte ouverte sur un lieu idyllique. Forcément, lorsque vous vivez dans le ghetto et que vous voyez une plage de sable fin, vous ne pouvez être qu’attiré par le lieu. Ainsi, je ne me vois pas marché, naturellement vers cette plage, je ne vois pas non plus les autres individus présent, je suis juste ébloui par la beauté du lieu et complètement scotché par son improbabilité. Je m’accroupi, je prends du sable blanc doux et chaud dans ma main puis je le laisse s’échapper entre mes doigts, lentement…

Je regarde, tout autour de moi et je ne vois toujours pas les autres qui, sous le choc comme moi, observent également. Quand j’arrive au bord de l’eau, celle-ci est transparente, comme celle que l’on peut voir sur les vieilles brochures qui parlent des Malvides ou d’autres îles du genre. Le soleil carresse agréablement le peu de peau non couverte et sa chaleur me réconforte. Je me laisse donc tenter et j’ôte mon gros blouson laissant mes bras nus s’exposer sous cet astre brûlant. Même l’air semble tout autre, il est plus respirable, plus pur, plus doux. Mes bronches souffrent beaucoup moins ici. Je suis comment dire, dans un rêve. Un rêve que je n’ose presque plus faire, là-bas dans e ghetto, un rêve totalement inaccessible, et pourtant.

Une plage.

La rumeur a enflé pendant un moment et s’est répandue dans tout le Ghetto. C’est un client qui m’en a parlé ce matin. On a une porte dimensionnelle, qui donne sur une plage paradisiaque de sable blanc et de mer turquoise, avec un magnifique soleil. J’avoue m’être d’abord demandé s’il avait pris quelque chose. Après tout, la vente de drogue est monnaie courante ici-bas. Mais non, c’est une histoire sérieuse ! Plusieurs personnes en ont parlé. Même Pinxit industrie a transmis un message sur le sujet via sa figure dans le Ghetto.

Du coup, je me suis décidé à aller voir par moi-même, bien que j’ignore à quoi ressemble une plage. Ce sera une première pour moi. Mais je préfère ne pas y aller seul. Alors j’ai convié Imeane, vu qu’elle est ce qui se rapproche les plus d’une amie pour moi. Et que je suis sure qu’elle verra les choses telles que moi. Et elle se posera probablement les mêmes questions. Nous voyons le monde à travers les mêmes yeux après tout.

Arrivés devant la fameuse porte dimensionnelle, nous ne bougeons plus. « Alors à ton avis, c’est quoi ? » Je demande lentement en clignant des yeux. C’est comme si on avait en face de nous un autre monde. Il y a là réellement une plage de sable sur laquelle il y a déjà des gens. On peut apercevoir la mer, bien bleu, qui vient mourir à un rythme régulier sur le sable blanc. Le ciel est bleu, dégagé et non pollué, un ciel comme personne n’en a jamais vu dans le Ghetto. Alors c’était cela une plage il y a longtemps. Je reste sans voix, admirant le paysage sans oser franchir la limite. Il y a quelque chose d’intimidant dans ce paysage utopique.

Je mordille ma lèvre inférieure. Instinctivement, pour me rassurer ou me donner du courage, je tâtonne jusqu’à saisir les doigts d’Imeane. C’est rassurant de sentir la chaleur de sa peau. Et cela me rappelle que ce n’est pas un rêve. Je prends une profonde inspiration. « Alors, on tente le coup ? » Je demande en tournant la tête vers ma compagne. J’ignore si on risque quelque chose en passant dans ce monde paradisiaque et protégé de la destruction du notre. « On ne risque pas grand-chose en théorie d’après ce que j’ai compris…. Tu as déjà été à la plage ? » Je parle pour évacuer le stress et le doute comme toujours.

« Attends, attends Haïna. Une plage ? T'es sérieux là ? Ou alors t'as encore bu quelque chose qu'il ne fallait pas ? »
« Je te le jure Ime, viens voir, tu verras bien. Je déconnecte. »

Une plage.... Non, ça ne pouvait pas être vrai, comment une plage pouvait apparaître comme ça, de nulle part. À moins que.... Elle entra directement dans la matrice et chercha tout ce qu'elle pouvait trouver sur les ouvertures dimensionnelle. Au moment où elle trouvait les informations, elle reçu une notification de Sileas qui l'invitait à voir cette plage. Son cœur se mit à battre frénétiquement comme chaque fois que la perspective de passer du temps avec lui se présentait. Elle tapait donc virtuellement dans la matrice ''cœur qui bat lorsqu'on doit voir une personne''. La matrice saurait elle non ? Elle compilait tout ce qui était humainement possible de compiler. Sauf qu'au moment de lancer la rechercher, elle laissa tomber. Pas le temps pour ça, la plage l'appelait et puis si Sileas voulait y aller avec elle, ce n'était pas le moment de le faire languir et d'aller voir autre chose en même temps. Elle se déconnecta alors de la matrice, récupéra son sweat à capuche. Toujours caché, comme si elle craignait le soleil. Une fois dehors, elle rejoignit le point de rendez-vous avec Sil et tous les deux prirent le chemin de la brèche. Une fois devant la brèche, mon regard se fait inquisiteur et à la question du jeune homme, je hausse les épaules. Comment ceci à pu arrivé ? Comment est-ce qu'une brèche telle que celle-ci à pu se produire ? La question est bonne et elle ne sait pas y répondre.

« Un brèche temporelle. Un trou dans l'espace temps. L'un de ceux inexplicable qu'il pourrait y avoir ? Non, il doit y avoir une autre raison. »

Elle avait murmuré ça, pour le garder pour elle, mais la technomancienne ne doutait pas que le jeune homme l'ait entendu. Il s'agissait d'un trou assez immense, genre double porte. Quelque chose d'étrange qui invitait à entrer. Elle est tellement concentré qu'elle ne sent qu'à la dernière minute les doigts de Sil prendre les siens. Oui, un peu de courage est nécessaire. L'inconnu est attrayant, pourtant, ce n'est pas l'inconnu qui fait battre son cœur à un rythme tellement entêtant que s'il continue, il va sortir de sa poitrine. Elle soupire, mêle ses doigts aux siens et sourit doucement à sa question.

« Bien sur qu'on tente. Tu vas sérieusement rester dehors ? On va peut-être trouver des trucs sympa de l'autre côté. Et l'aventure c'est le pied non ? »

Enfin façon de parler, parfois c'est quelque peu dangereux, mais pour l'instant, ça n'a pas d'importance franchement.

« J'en ai construit quelques unes dans la matrice. D'après différentes images, d'après ce que j'ai pu récupérer comme information, mais ça n'a rien à voir avec ce que je vois là. Tu as vu ? Le ciel est d'un bleu si clair, pas un nuage et on sent les rayons brûlant du soleil caresser notre peau. »

Sa capuche était tombé et elle entraîna le jeune homme à travers la brèche.

« Tu sens ? L'embrun de la mer, cette odeur salé et sauvage de la faune qui vit en dessous. Le sable chaud et doux sous nos pieds et qui ne cessent de s'infiltrer. Cette air pur qui a une odeur tellement différente du nôtre et qui vient délicieusement chatouiller nos sens et le cuir chevelu. »

Un sourire extatique sur le visage et elle comprend maintenant le sens du mot bonheur. Elle se sent bien là, avec Sil, dans un endroit différent de d'habitude, un endroit calme et tranquille.

« Viens, regarde la mer est si transparente qu'on voit à travers, comme s'il s'agissait d'un saphir de plusieurs carat qui enfermerait toute un paysage aquatique. J'ai envie de plonger mes pieds dans l'eau. »

Un sourire, elle se tourne vers lui et l'entraîne vers les boutique.

« On va se chercher un maillot de bain ? J'ai envie de me baigner, de sentir la fraîcheur de l'eau et de pouvoir étudier le fond marin. Ça te dit ? »

Excité ? Non à peine, elle est juste hyper heureuse de ce qui arrive et est prête à tout, pour y embarqué Sileas.

La plage et la mer. Ma connexion permanente à la Matrice m’a permis d’avoir instantanément des informations sur ce lieu. Il y a  d’abord la mer, petite zone côtière faisant partie des vastes océans. Elle a diverses couleur selon les latitudes et la chaleur des lieux. Elle oscille en mouvement régulier, que l’on pas calculer, en quatre ou deux temps. Généralement, les vagues viennent mourir sur une plage soit composée de sable, autrement dit de petites roches et coquillages désagrégés par l’eau salée en mouvement, ou de galets. Parfois il y a des falaises comme en France du coté de la Bretagne. Autrefois certaines plages étaient prisées par les vacanciers. On y venait pour se baigner, se dorer au soleil comme de la viande sur un grille ou bien jouer. Certaines étaient plus cher que d’autres. Il y avait les digues, les magasins, hôtels, restaurant… Puis dans certains cas, ces lieux paradisiaques pouvaient permettre de belle rencontre avec des dauphins ou de tragique accident avec des requins. Mais les gens aimait y aller. C’est surtout associé à de bons souvenirs collectifs.

Du coup pourquoi est-ce que je ne tenterais pas l’aventure ? Je ne risque probablement pas grand-chose vu que tous les gens ayant passé le portail se portent bien. Et puis, c’est synonyme de bonheur. Et c’est bien la première fois que je vois autant de sourires dans le Ghetto. Piquée à vif par ma curiosité et mon besoin de tester les choses pour appréhender le sentiment humain et la réaction humaine, qui y sont liés me font sauter le pas. Je passe par la porte. Je ferme les yeux. Et….

Rien ne se passe. Pas de court-circuit. Pas de bruit étrange signalant un problème. Pas Eve qui tombe en morceaux. Je bouge un peu. J’ouvre un œil puis l’autre. Et je souris en grand. C’est cool comme lieux. Mes pieds s’enfoncent dans le sable. Je m’agenouille pour en prendre en main histoire d’en sentir la texture exacte et de le voir de plus près. Peu sure de ce que je peux faire, je me relève et je marche vers l’eau. Je ne compte pas y plonger, juste voir de plus près. Et puis, le bruit des vagues est envoûtant et apaisant tout à la fois.  

En m’approchant, je remarque une silhouette familière, Allanon, vers laquelle je me dirige avec le sourire. Il a les mains plongée dans l’eau alors que je garde une petite distance de sécurité. « Elle est chaude ou froide ? » Je questionne même si la logique voudrait que vu la chaleur ambiante l’eau soit à température agréable. « Je n’oserais pas y plonger la main ! »

La vie semblait tellement compliqué ces derniers temps. Je ne sais pas comment vous expliquer, mais avant je trouvais ça drôle, seulement avec mon grand frère malade, le petit qui n'arrive pas à se défendre et ma frangine qui ne cesse de râler parce que le temps est pourri, ouais ces derniers temps, ils ne cessent de râler, je me demande bien pourquoi. Le temps gris ? Le manque à gagné ? Ou alors la bande de connard qui veut absolument mettre le grappin sur mon petit frère et qui pour cela son prêt à tout. Je leur ai bien explosé la gueule la dernière fois, mais visiblement ça n'a pas suffit. Peut-être que je devrais casser quelque jambes bras, ou alors que je devrais leur montrer mes crocs.... Purée mais pourquoi j'ai autant envie de me battre moi ? Je sais pas, j'ai l'impression d'être toujours sur les nerfs, d'avoir une dent contre tout le monde. Un peu de vacances serait pas du luxe, j'ai envie d'emmener Esia quelque part, de lui faire voir autre chose. J'ai envie de lui montrer autre chose que des types qui veulent se servir de son talent pour en faire un faussaire. J'ai envie de prendre soin de lui, mais pour être honnête j'ai aussi envie d'oublier.... De l'oublier. Une vague de tristesse affaisse les côtés de ma bouche, bordel.... Il faut réellement que j'arrête de penser à ça. C'est fini, ce n'était qu'une fois et ça devrait le rester, mais.... Enfin je vais pas vous dévoiler ma vie sérieux, ça sert strictement à rien ce genre de truc. Et puis je suis pas du genre à me lamenter. Concentré à parler avec ma conscience je ne vois pas la boule de poils qui me rentre dedans comme un sauvage et je finis le cul par terre.

« Hoy Esia bordel. Combien de fois je t'ai déjà dis de ne pas courir dans la maison comme ça ? Et surtout de ne pas sauter sur les gens s'ils ne t'ont pas vu avant. »
« Désolé Shay', mais y'a un copain, il a vu un truc trop cool. Il a dit qu'il y avait une plage. »
« Il a bu quoi ton copain ? Un truc pas net ? »
« Je l'ai vu aussi. Un grand portail et il y avait du sable jaune, de l'eau très bleu et y'a du soleil. »
« Attends, t'es en train de me dire que tu es sortie alors que je t'ai dis de faire attention. Esia franchement, tu sais très bien qu'il faut que tu fasses attention. Tant que tu ne sera pas te défendre seul, il faut absolument que tu évites de sortir comme ça. »
« Oui, mais... J'étais avec John et son frère. Je risquais rien, tu sais, son frère c'est un gens bien. »
« Ouais je sais.... »

Je le serre doucement dans mes bras. Je ne veux plus perdre personne, c'est hors de question. Je ne veux plus avoir à pleuré pendant des jours, voir un mois. Si je devais perdre Esia.... Je joue parfois la carte de la famille, comme j'ai fais avec ce jeune homme... Sileas. Mais je suis réellement attachée à eux. Je ne peux me permettre de les perdre et c'est bien pour ça que je me tue à la tâche. Que j'enchaîne les boulots. Pour l'instant, je suis la seule à pouvoir procurer ce qu'il nous faut à la maison, et à ne pas perdre cette unité. Sans eux, de toute façon je serais très probablement morte, je peux bien leur rendre la pareille non ?

« On peut y aller alors ? »
« Ok, on y va, laisse moi juste me relever et ensuite on y va. »

J'ai donc pris la main de mon petit frère et je me suis dirigé vers la masse qui affluait. C'est pas tous les jours qu'un événement de cette sorte se passe dans le ghetto, donc autant qu'on en profite. Je dois bien l'avouer n'empêche, je suis resté totalement bouche bée devant l'ouverture, seulement, mon odorat me signifiait que quelque chose était bizarre. Je laisse la bête faire un peu plus surface et je le ressens, l'odeur d'un homme. Ce n'est pas quelque chose qui devrait me tilter, sauf que là, l'odeur est teinté d'une certaine souffrance, étrange, sans compter ce son d'un cœur qui bat. C'est bizarre, mais Esia me tire déjà par la main. Je souris comme une enfant en tentant de ne pas montrer mes crocs. Une fois sur le sable, je me dis qu'on aurait mieux fait de prévoir un short, alors je me dirige vers les boutiques et je prends tout ce qui pourra nous être nécessaire. Je fais changer ses affaires à mon petit frère et une fois que je lui ai mis de la crème solaire et un chapeau, il se met à courir et je me lance à sa poursuite comme deux gosses. On court à perdre haleine comme deux crétins. L'eau est en même temps fraîche par rapport à la température extérieur et en même temps agréable et lorsque je passe devant un grand type et une jeune femme et que je les entends, je ne peux m'empêcher d'avoir un sourire espiègle. Esia s'arrête et je lui explique rapidement. Il m'éclabousse, je fais pareil et je lance de l'eau vers les deux autres qui sont arrêté, les aspergeant en quelque sorte, un sourire aux lèvres.

« Pas besoin de plonger la main. Elle est bonne hein ? »

Toujours souriante, je vois Esia qui retrouve ses copains. Je lui conseille d'être prudent et de revenir s'il y a un souci et je me tourne vers les deux qui ont l'air coincé. J'ai les pieds dans l'eau, jusqu'au genou au moins. Un petit short de plage qui laisse passé ma queue -bizarre qu'ils aient eu ça enfin bref- et un haut de maillot de bain. Ouais, je suis pas bien habillé, en même temps avec cette chaleur. Et oui je sais qu'on peut voir les quelques cicatrices que j'ai récolté, d'une une assez immense dans mon dos, mais peu importe. Je rigole doucement et je finis par dire.

« Vous devriez réellement venir, elle est bonne et ça vous rafraîchira un peu, parce que ça tape sous un soleil pareil. »

Je les invite à me rejoindre, plus on est de fou, plus on rit non ?

Ces grains de sables sont authentiques, doux, chaud et leur touché me rappelle mon adolescence. Lorsque la Terre était encore viable et lorsque je me baladais sur les plages de la côte ouest. Les doux rayons du soleil chauffaient mon corps et apaisaient mes douleurs. Des douleurs acquises lors des combats au corps à corps. Ils étaient presqu’inévitable lorsque je sortais du Ghetto. Et parfois même dans le ghetto. J’oublie où je suis, j’oublie tout. Même les gens qui défilent. Il y a des visages familiers mais mon attention n’est pas ers eux. Du moins, je ne souhaite pas les déranger dans ce moment de détente inespérée. Je ne pense même pas au pire, comme j’en ai l’habitude. Je déguste seulement le moment présent. Si bien que je crois entendre la voix familière de Sileas et celle d’Imeane aussi, cette jeune femme rencontrée dans la matrice. Lorsque je me retourne, je ne les vois pas.

Je continue alors ma contemplation. Je songe à enlever mes chaussures et peut être même mon pantalon pour goûter l’eau de plus près. Je n’ai pas les vêtements adéquats mais un caleçon reste un caleçon et ça cache le nécessaire. On ne pouvait pas se permettre de chipoter. Mas avant que je ne prenne l’ultime décision, une autre voix familière m’accueillit. Une voix qui me fit sourire. Ma pipelette préférée. Eve.

« Elle est bonne Eve. Mais effectivement il ne vaut peut-être mieux pas t’y risquer… C’est dommage. Mais est-ce que tu peux sentir la caresse du soleil ? »

Ma question pouvait paraître stupide mais la technologie était si avancée. Les émotions existaient bien chez les robots désormais alors pourquoi pas les sensations si subtiles ?

« Je suis content de te voir ici Eve. Comment tu as su ? »

C’est vrai ça, maintenant que j’étais en dehors de ma bulle, je remarquais qu’il y avait tout de même pas mal de personne ici. Comme si une annonce avait été faite de l’autre côté.

Machinalement, je commençais à me déshabiller. Je vis même une jeune femme et un petit homme passer devant nous et filer droit dans l’eau. Mon regard était assurément envieux, mais j’avais presque peur de laisser Eve seule sur la plage. C’était triste, même si elle ne devait pas voir la chose de la même manière. Du coup, je suis à moitié déshabillé lorsque je me prends de l’eau en pleine poire. Je n’avais pas fait attention à la jeune femme trop concentré sur la manière de demander à Eve de me laisser le temps de piquer une tête. Machinalement, je la repoussais doucement pour ne pas qu’elle se prenne trop d’eau. L’électronique et l’eau ne font pas trop bon ménage.

« Tu me pardonnes Eve ? »

La tentation était trop forte. Je finis d’enlever mon pull et mon t-shirt me retrouvant torse nu et en boxer devant deux femmes, et je courus plonger dans l’eau, faisant bien en sorte d’éclabousser la jeune femme qui venait de nous interpeler. Qui a dit que je n’étais pas resté un gamin dans ma tête ?

« Effectivement, elle est très bonne !! » dis-je un peu plus loin. Je renversai la tête en arrière tout en ramenant mes cheveux dans un certain ordre pour que je puisse voir quelque chose.

J’avais de l’eau jusqu’à la taille et j’avais réellement envie de trainer Eve avec moi.

« Tu ne peux vraiment pas venir Eve, tu es sûre ? » dis-je assez fort pour qu’elle m’entende.

Imeane a forcément une réponse très rationnelle. Je la trouve cohérente moi aussi. Et c’est probablement la réponse que j’aurais donné. Mais en réalité, il n’y a que Pinxit, qui pourrait avoir ce genre de technologie. C’est impossible à développer dans le Ghetto avec le peu de matériel que l’on possède. Et comme je vois mal l’industrie des riches offrir un peu de joie à ceux qu’elle destine à la mort après avoir servir au maximum… L’explication doit venir d’autre part. Pourtant, je ne fais aucun commentaire. Je me contente de hocher de la tête et d’approcher prudemment. Mais quoique ce soit, je me méfie un peu et je cherche le réconfort dans le toucher. Maman me prenait souvent la main quand je paniquais étant enfant. Ici, je n’ai que Imeane. J’espère qu’elle ne le prendra pas mal. Sa peau douce et chaude contre la mienne est rassurante et me donne du courage.  Au lieu de se dégager, elle entremêle doucement nos doigts. Mon cœur rate étrangement battement. Mais près d’elle, j’ai toujours des réactions physiques surprenantes et inexplicables. Je me suis un peu habitué à cela.

« Ok. » Je réponds avec un hochement positif de la tête. Après tout, les gens qui y sont entrés sont toujours vivant. « Allons-y »

Je souris quand Imeane me parle de ses constructions au sein de la Matrice. Je pourrais en faire autant même si en général, je me contente de passer d’une salle à l’autre. En prime, j’ai un faible pour la forêt. Et elle me tire par la main à sa suite sur la plage. Le soleil frôle ma peau, et le vent est comme un caresse tendre et fraîche. L’air semble plus pure. Et l’odeur n’est ni fétide, ni désagréable comme dans le ghetto. C’est comme entrer dans un autre monde.

« Il faudra que tu me montres tes plages dans la Matrice. » Je commente, parce que je suis toujours curieux quand cela la concerne. Encore un détail que je ne m’explique pas. Je souris amusé par son enthousiasme grandissant. Et comme elle ne me lâche pas la main et que je ne fais rien pour me libérer de ce doux contact, je la suis partout. « Oui, je sens. C’est la première fois que je viens réellement à la plage. » J’explique. Il n’y en avait pas dans ma ville natale, juste traversée par un fleuve. Et depuis que je vis ici, je ne vais du coté du rivage que pour commercer avec les pirates. Et puis même, la plage d’Édimbourg est très différente de celle-ci. « Mais j’en avais vu dans des livres. » J’ajoute rapidement.

Je suis Imeane, ma main toujours prisonnière de la sienne. Et à la voir sourire ainsi, je souris à mon tour. Je suis bien et heureux d’être dans ce lieu paradisiaque avec elle. Je pense qu’on va s’amuser un peu, loin des tracas habituels du Ghetto. « Tu ne serais pas poète ? » Je questionne à sa comparaison entre l’eau clair et le saphir. Mais j’avoue que c’est une comparaison logique et très joliment formulée. Puis, elle fait demi-tour et m’entraîne vers les boutiques. Pour le coup, je fronce des sourcils un peu. Là, je en comprends pas trop sa logique. Ce qui est une première.

« Euh oui ? » Après tout elle m’a déjà vu en boxer après une douche froide forcée. Elle sait à quoi je ressemble. Et je ne suis paraît-il pas trop moche comme mec. Bien que je ne m’inquiète guère du regard des autres. C’est étrange comme ce lieu l’a transformée. Elle irradie de bonheur. Et c’est contagieux. « Ok va pour le bain et la recherche sous-marine. » J’approuve, et je prends un maillot à ma taille avec un tuba et des palmes. J’attends qu’elle fasse son choix pour payer. « Mais c’est ton idée, donc tu es le chef de l’expédition. »

Ce n'était pas parce que la Pinxit avait accordé des jours de congés à tout le monde qu'il fallait prendre du retard. Nous avions donc fait quelques emplettes avant de nous rendre sur la plage où j'avais ordonné à Victor d'aménager le lieu à ma convenance, un peu à l'écart de la foule. Deux chaises longues surplombées d'un parasol, une table basse en rotin et des serviettes au sol pour nous protéger du sable. La perspective d'une baignade ne m'enchantait guère mais c'était l'occasion idéale pour travailler au soleil et bronzer. J'avais opté pour un bikini noir et Victor pour un short de plage, même s'il ne s'était pas départi de son holster.

Une tablette posée sur les cuisses, je parcourais les nombreux mails que mon intervention télévisée avaient suscités. "L'opération de communication est un succès même si nous avons un nombre croissant de demandes de fous prêchant la fin du monde."

Victor, allongé sur une serviette, regardait les plaisanciers sans répondre. Ma remarque ne rentrait pas dans ses algorithmes de discussion mais j'appréciais de faire la conversation sans être contredite.

"Il faut signaler ces profils de désaxés aux Blades."

J'annotais les codes puces de ces personnes de la catégorisation SP2, pour surveillance psychologique, qui indiquait la possibilité d'une dérive mentale et d'un danger modéré pour la population. Certains avaient le droit au SP3 lorsque leurs propos étaient trop virulents, d'autres SP1 quand le risque était faible. L'une des  fonctions de chargée de communication était justement d'aider les Bladerunners et la corporation à faire le tri dans la population entre les profils positifs et ceux à écarter. Je m'appliquais avec méthode à classer mes interlocuteurs par catégories sans qu'ils ne se doutent qu'un mot déplacé pouvait les amener à se faire surveiller ou évincer d'un emploi convoité.

"Peux-tu replier le parasol ?" Je me protégeais le visage d'une capeline et de lunettes de soleil tandis qu'il s'exécutait. La chaleur du soleil me pénétrait sans me brûler grâce à un vent frais chargé de l'humidité de la mer et lorsque la chaleur se faisait trop intense je me désaltérais d'une gorgée de cocktail Rio que des serveurs proposaient à la carte à leurs clients. Je travaillais encore une heure avant de reposer la tablette.

"Je vais dormir un peu." La langueur du soleil, le bruit des vagues et les cris joyeux qui nous entouraient, des mouettes, le cadre était parfait pour se détendre.

Victor se redressa sur un coude, indifférent au soleil. Comme elle, ses améliorations le rendait insensible aux coups de soleil. Il profitait aussi de ce lieux sans menace, même si sa programmation ne lui permettait pas de se relâcher.

Joyeuse... Oui, s'était le sentiment qui régnait. Pour une fois, elle pouvait arrêter de se prendre la tête pour pinxit qui la recherchait, pour son frère qui avait tant changé sans qu'elle ne puisse rien y faire, pour ses parents qui ne voulait qu'une chose qu'elle reprenne cette foutue place qu'elle avait laissé en plan parce que pour elle, il n'y avait aucun intérêt. Elle aimait cette liberté que lui procurait cette brèche temporelle et si la technomancienne se posait la question du son de ce cœur qui battait dans son oreille et qu'elle pouvait entendre grâce à ses améliorations, elle n'en était pas moins heureuse d'être ici et de pouvoir, pour une fois se détendre et cerise sur le gâteau, elle y était avec une personne qu'elle appréciait réellement. Pas seulement pour son esprit qui était tel que le sien, mais aussi pour sa façon d'être. Avec lui, elle avait réellement l'impression de pouvoir être elle. Pas besoin de faux semblant, elle pouvait se sentir mal à l'aise, elle pouvait être elle, dans toute sa splendeur et sa façon d'être. Sans que quiconque ne cherche à savoir si elle avait un souci ou si elle était totalement débile de ne pas montrer d'émotion, ou de ne pas les comprendre. Ça soulageait en quelque chose.

« Pas de souci, je te montrerais tout ce que tu voudras dans la matrice, j'ai créer de nombreux paysage qui ne sont accessible que pour moi. Mais je peux faire un effort et te les ouvrir. »

Un sourire, un des rare qu'elle donne, mais à lui, elle peut le faire non ? C'est étrange, il la rassure, comme personne d'autre avant lui. Elle a l'impression d'être plus forte avec lui à ses côté. Comment avec son frère ? Oui et non, c'est d'une toute autre façon qu'elle a l'impression d'être forte. Son frère ne fait pas battre son cœur à mille à l'heure et surtout, il ne lui fait ressentir des émotions qu'elle ne comprend pas parce qu'elle n'en a jamais eu de semblable. C'est étrange, déroutant, mais elle aime en fait.... C'est bizarre, elle si rationnelle, ne se prend jamais la tête quand elle se retrouve avec Sileas et qu'elle ne peut pas analyser les choses de la même façon que d'habitude.

« Non, je ne suis pas poète, je suis juste moi. »

Elle ne dit rien de plus, qu'est-ce que la jeune femme pourrait dire ? Ime n'est pas forte pour les relations, elle n'est pas douée pour faire plaisir aux gens, elle n'est pas douée pour mener une conversation. C'est ça de ne parler que de code, ou de ne pas parler du tout en somme. Elle se sent perdu d'ailleurs par moment, parce qu'elle ne voit pas la même chose que les autres, parce qu'elle ne perçoit pas de la même façon que tous les autres. C'est déstabilisant, enfin pas tant que ça finalement, ou peut-être trop. Peut-être que la jeune femme devrait penser à sortir un peu plus parce que bon voilà quoi. Sauf que la menace pèse toujours sur sa tête et que donc, il vaut mieux éviter de sortir uniquement pour sortir. Un soupir s'échappe de ses lèvres, bien vite oublié par les paroles de Sil. Ils avancent vers les boutiques, tout le monde est agréable et Ime n'hésite pas à prendre un maillot de bain deux pièces qui met en avant le corps musclé de celle qui s'entraîne tous les jours et surtout le corps de quelqu'un qu'on a entraîné dés son plus jeune âge. Je mets un paréo autour de mes hanches et prend le masque et le tuba qui nous permettra de voir à travers cette magnifique eau clair.

« Avoue, tu as peur en fait. Mais ne t'en fais pas, je suis là pour te protéger. »

Un sourire, mais je me sens un peu abandonné et nerveuse depuis qu'on a dû se lâcher la main pour s'habiller correctement. C'est bizarre comme sa présence peut être normale, comme si ça avait toujours été comme ça. Sans réellement comprendre pourquoi d'ailleurs, elle finit par hausser les épaules. Les cheveux attaché en une longue queue de cheval, elle est fin prête et surtout, sautille sur place. Comme lorsqu'elle est sur le point de piquer toutes les informations qu'on lui a demandé. C'est quoi ce sentiment déjà.... L'excitation... Ouais, elle est impatiente et excité de cette petite découverte, de ce moment de liberté. Alors, quand Sil arrive, elle lui prend la main de nouveau, et se sent de suite mieux, plus posé, plus calme, moins nerveuse, mais toujours aussi heureuse et elle l'emmène gentiment vers l'eau pour regarder une fond marin. Il ne lui faut pas plus de deux second pour se jeter à l'eau, qui est fraîche par rapport à la chaleur qui irradie sur la plage. Elle ne tarde pas à mettre le masque et plonger la tête sous l'eau pour voir ce que recèle le fond marin.

« Regarde Sil, un corail doré, c'est bizarre hein ? Il y a des tonnes de petits poisson dont je ne connais même pas le nom... Peut-être que.... »

Ouais, elle se connecte à la matrice, cherche par image, merci d'être technomancienne, pas besoin de code pour arriver à ses fins quand on est pressé.

« Des sergent majeur, des poisson-faucon, ds demoiselle bicolore... Je vais pas te faire une liste, mais c'est magnifique, ça fait de superbe couleur. Et en plus y'a des algues violette. C'est assez drôle. »

Elle est calme cette fois-ci, fini l'excité, elle passe plus dans le domaine de la science, regarder, découvrir, apprendre.

« Alors ça te plaît ? On peut retourner sur le bord de la plage si tu désires. »

Elle attend patiemment, comme d'habitude. Son visage est un peu souriant, mais sans l'être totalement non plus. Un peu plus loin plusieurs autres personnes sont dans l'eau et s'amuse visiblement. Elle vient de remarquer celle de pinxit qui fait la liaison dans le ghetto, et qui s'installe tranquillement sur le sable, sans compter Eve qu'elle a déjà rencontré et qui se tient de l'eau pour ses circuits. La plage, c'est sympa quand même, ça rapproche les gens sans qu'ils ne s'en rendent compte.

Je me doute que je ne dois pas prendre un bain. L’eau est déjà un problème en soi, même si je suis étanche, cela ne doit pas s’étendre à la baignade. De plus, l’eau de mer est salée. Je pense que cela est fortement déconseillé pour mes circuits sensibles. Du coup, je me retrouve à rester sur le sable chaud non loin des vagues et à proximité de Allanon. J’observe le mouvement régulier et oscillatoire de l’eau, qui est d’un beau bleu. C’est paisible malgré le nombre de personnes présentes sur la plage en arrivage directe du Ghetto. Cette petite bulle de bonheur offerte gratuitement à tous me fait sourire un peu plus. Cela est si apaisant de voir tout le monde heureux. Cela change des mines tristes et sombres, que je croise tout le temps.

« Et bien, je suis assez précise dans ma série. Ayant été conçue pour tenir compagnie, j’ai été pensée le plus humainement possible. Donc je peux sentir le soleil et le vent sur ma peau, je sens l’odeur iodée et salée de l’eau… En fait, je perçois tout aussi bien que toi. » J’explique gentiment avec un doux sourire. Je n’ai aucune raison de mentir à mon ami. Il est de la résistance et il sait ce que je suis.

Je me tourne pour observer les gens de plus en plus nombreux. Certains s’étendent sur le sable pour bronzer ou profiter du soleil. D’autres, surtout les enfants, jouent ou bien construisent des châteaux de sable. C’est agréable comme ambiance. Je me demande si je ne devrais pas m’asseoir moi aussi. Je reporte mon attention sur mon ami, et je penche un peu la tête.

« En me promenant. » Je réponds. « J’ai vu le portail. J’ai hésité, puis j’ai tenté ma chance en croisant les doigts. Et toi ? »

Près de nous, une jeune femme et un garçonnet passent. Allanon commence à se dévêtir. Présentant que je risque de peu bouger, bien que la plage soit vaste. Je regarde à nouveau mon ami. Il semble prêt à plonger la tête la première dans l’eau, ce que je peux comprendre. Je le ferais sûrement, si je n’étais pas sure de couler au fond de la mer vu mon poids et mon inaptitude à nager. Cela n’a jamais été programmé comme compétence. La jeune femme blonde nous asperge d’eau, et je recule instinctivement craignant le court-circuit. Allanon s’excuse alors.

« Je t’en prie, amuse-toi » Je commente. « Moi, je préfère éviter les problèmes techniques. Je vais vous regarder »

Je fais trois pas plus loin. Je jette un regard à une jeune femme brune assisse sous un parasol plus loin. Je retire ma veste en jeans. Et je la dépose sur le sable et je m’installe dessus. Je ne risque pas le coup de soleil en théorie. Je regarde un moment le ciel bleu puis mes yeux se reposent sur la jeune femme, qui joue avec Allanon. Je les observe avec amusement.

J'aime l'eau, contrairement à tous les chats, les panthères ne sont pas tant frileuse que ça avec l'eau et si la bête n'en est pas forcément fan, l'humaine en moi l'est et c'est encore elle qui décide de toute façon. Alors je barbote tranquillement, je jette à œil à mon frangin histoire de vérifier qu'il ne fait pas l'idiot et surtout qu'il n'ennuie personne. Il est très joueur, tout comme les petits louveteau et puis il n'a vraiment que onze ans, donc même s'il est en pleine puberté, pour moi, il reste un môme. Un môme auquel je dois mettre des limites par moment. Qu'est-ce que je ferais une fois partie ? Quand il prendra sa vie en main ? Est-ce que je me déciderais moi aussi à prendre la mienne ? Parce que si je vie maintenant, c'est pour lui, pour lui promettre une belle vie, pour qu'il puisse apprendre et se débrouiller par lui-même... mais sérieux à quoi je pense dans ces moments-là ? Je suis totalement débile, j'y crois pas. Il fera sa vie quand il voudra, je fais bien la mienne moi. Le ghetto nous apprend très vite à nous démerder, je sais qu'il s'en sortira très bien, je crois que c'est moi finalement qui ait peur... De ne plus avoir de but une fois qu'il décidera qu'il n'aura plus besoin de moi. Je m'inquiète, de chose et d'autre. Qui suis-je sans lui ? Sans ma famille ? Sans ceux que je côtoie ? Juste une voleuse ? Peut-être que je devrais aller voir Kyle une nouvelle fois. Il a le don de ne plus rien me faire penser. Ça ne me ferait pas trop de mal en ce moment. Un sourire et je vois mon petit monstre filé tout droit vers la jeune femme qui de ce que j'ai pu en voir une fois est une androïde. Je n'y avait pas pensé quand j'ai commencé à les éclabousser.

Je secoue la tête de voir Esia s'avancer vers quelqu'un d'autre que moi. Il est si … Enfin, d'habitude, il ne reste que près de moi. Un peu de jalousie ? Peut-être un peu ouais, je vais pas le nier ce ne serait pas productif. Mais je l'aime mon petit frère, sans lui, je serais toujours en train de pleurer la mort d'un autre de mes frères. Alors bon, je le chéris, je prends soin de lui et je fais attention à ce qu'il ne manque de rien mon petit loup. Je fixe ensuite un instant mon regard sur l'homme qui m'a rejoins dans l'eau. Plutôt pas mal, je dois bien l'admettre. Si je n'avais pas des vus sur une certaine personne depuis la dernière fois, je crois que je me laisserais tenter. Ou alors je me laisse tenter. Je pourrais jouer avec lui non ? Il ne semble de toute façon pas faire attention à moi, préférant parler avec son amie. Il n'a probablement pas tord. D'ordinaire je me serais immiscé dans la conversation, j'aurais attiré son attention juste pour voir de quoi il est capable. Sauf que je suis avec Esia, qui semble vouloir s'amuser avec la jeune femme.

« Tu veux faire des châteaux de sable avec moi ? »

Voilà une question digne d'un gamin. Dommage que ses capacités le fasse vivre dans son monde. J'ai envie qu'il grandisse pour lui montrer de nombreuse chose dans le ghetto.

« Je m'appelle Esia et toi ? »

Alors, qui a dit que mon frère n'était pas mignon ? Cependant, je n'arrive pas à me réjouir. C'est étrange, quelque chose s'agite en moi, l'instinct de survie peut-être ? Je n'en sais rien, mais la bête s'agite, son instinct est meilleur que le mien et je n'ai pas fais un pas que je sens déjà le sable bouger. Qu'est-ce que s'est que ce délire sérieusement ? Je me lève en hâte, j'avance vers mon petit frère qui fait de même et avant même que je ne puisse le rejoindre, le sable se lève et érige un mur. Je me jette contre la paroi, la bête panique et sort les griffes, elle griffe le sable, encore et encore pour passer à travers, mais rien n'y fait, elle n'y arrive pas. Le sable se régénère trop rapidement. Elle tente donc de passer par dessus, elle escalade, s'accrochant avec ses griffes, sauf que le mur semble monter au même rythme qu'elle. Elle descend, se laisse tomber au sol, les genou s'enfonce et elle grogne et hurle le prénom de son frère.

« ESIAAAAA »
« Je suis là Shay, je suis là. »
« Oh mon dieu tu vas bien ? »
« Oui, mais je suis coincé. Tu as entendu la voix ? »
« Oui mon cœur, j'ai entendu la voix. Avance d'accord. On va se retrouver à un moment, fais bien attention à toi. »
« D'accord. À tout à l'heure. »

Contrairement à elle, il n'a pas semblé paniqué. Son loup est plus docile, moins agité, comme s'il ne s'agissait que d'un chien domestiqué. Ma panthère est plus sauvage, c'est pour ça qu'il peut faire des trucs calmement que je ne pourrais pas imaginé. Je tente de me calmer, de calmer mes instincts et mon regard tombe sur ce couloir que je vais devoir suivre. Prendre la même direction que mon petit frère. Ouais, je vais faire ça. Dans mon couloir, il n'y a que du sable, parsemé de temps en temps de coquillage. Rien ne semble bouger, pourtant, la bête est en alerte. Elle n'aime pas cette situation et je dois avouer que je n'en suis pas fan non plus. Pourtant, il faut que j'avance, alors je commence à me à marcher.

Victor avait ressenti les perturbations dans le sable bien avant Calice et, si la menace perçue dans la voix avait été un signe annonciateur, les mouvements du sol avait été le déclencheur. Plus vite qu’elle n’aurait jamais pu réagir, il avait bondi au moment où une masse allait jaillir sous ses pieds et la projeter loin de lui et, dans un mouvement parfaitement programmé, il l’avait saisie à bras le corps en protégeant sa tête et sa nuque et avait roulé sur l’épaule pour se redresser en dégainant. Des murailles de sable avaient jailli de toute part en les emprisonnant dans un dédale. Ils auraient dû être séparés mais son action réflexe l’avait évité. Calice s’était crispée sur le moment, incapable de comprendre ce qu’il se passait mais s’était relâchée et attendait la fin de l’alerte, consciente d’être en danger. Protégeant les oreilles de la cadre, il tira deux coups rapprochés afin de vérifier la qualité du piège. Malgré la puissance de son arme, le sable absorbait les impacts et se reformait derrière. Il relâcha Calice et l’aida à se remettre debout. Une humaine normale aurait dû être paniquée et poser des centaines de questions mais au lieu de cela, elle se contenta d’observer les alentours, un pli de préoccupation et de contrariété marquant son front. Rassuré sur l’état émotionnel de sa patronne, il se redressa à son tour, reléguant sa programmation de gestion humaine en tâche secondaire.

Calice n’avait certes pas compris la situation aussi vite mais lorsque Victor l’avait projetée au sol, il était clair qu’elle était en danger. Aussi avait-elle attendue sagement que l’alerte passe. Une fois celle-ci éloignée et les routines de Victor passées sur un mode d’alerte moindre, elle s’était redressée pour observer les alentours. Par un jeu de perspective, elle pouvait se rendre compte que les murs autour d’elle étaient sculptés et qu’ils allaient en augmentant de hauteur, jusqu’à former une sorte de haute tour médiévale plus loin. Peut-être même l’entrée d’un château. Si elle ne voyait pas de chemin pour s’y rendre, elle ne doutait pas que ses pas finiraient par l’emmener là-bas. Tout autour, des cris de panique retentissaient.
« Nous ne pouvons pas laisser les gens aux mains de ce fou. Il faut trouver un moyen de les sauver. »

Même en bikini, l’employée de Pinxit se comportait comme si elle n’avait jamais quitté son tailleur, imperturbable.

« Soit nous avons affaire à un doopleganger de classe 3 soit à un piratage informatique et nous sommes piégés dans une simulation. Le mélange de la faille dimensionnelle plus du contrôle du sable me laisserait plutôt penser à un piratage mais il vaut mieux être prudents. Essaye de communiquer avec les gardes à l’extérieur pour te tenir informé de la situation.
- Si c’est un piratage, ouvrir ma communication pourrait donner un accès. Je préfère éviter. »

Calice pesa le pour et le contre. Si Victor se faisait pirater, sa situation passerait de préoccupante à incontrôlable. « Bien. »

Elle s’avança dans le corridor. « Si vous m’entendez, je suis Calice Wentworth. Nous allons faire notre maximum pour reprendre le contrôle de la situation. Des bladerunners sont situés autour de notre position et doivent être en train de chercher une solution en ce moment. Il est important de se regrouper. Si vous m’entendez, essayer de vous diriger vers ma voix. »

Aussi Pinxit soit-elle, elle avait sincèrement à cœur la protection des personnes piégées ici. Elle continua d’avancer en répétant régulièrement les mêmes mots jusqu’à ce qu’au bout d’un couloir, elle tomba face à une cour abritant une dizaine de sculptures de sable.

« Je passe devant. »

Elle a laissé ses phrases en suspend, elle regarde le jeune homme qui l'accompagne et elle se sent... Différente, comme si quelque chose se passait en elle. Ça lui fait peur, parce qu'elle ne comprend pas, elle sait juste qu'elle aime bien Sileas, qu'avec lui, tout semble plus simple et qu'elle n'hésitera jamais à lui filé un coup de main si jamais il a besoin. Elle ne veut plus se cacher, elle aimerait lui parler, de son passé, de sa famille, de ce qui lui est arrivée, de pourquoi elle est partie, de pourquoi elle ne reviendra pas, de commet tout cela est possible et surtout de pourquoi. Elle aimerait lui parler de son frère, lui dire ce qu'elle ressens en sa présence, peut-être qu'il serait lui ? Non, peut-être qu'elle devrait aller voir Eve, elle, elle pourrait probablement comprendre... Ou peut-être pas. La jeune femme est perdue, elle ne sait plus quoi dire, ni quoi faire. Son cerveau échafaude des tas de théories et dans chacune d'entre elle, ça se finit mal. Pourquoi quoi que ce soit finirait bien, après tout, elle était partie de chez elle, avait abandonné la moitié de son âme là-bas, elle se battait ici bas contre la citadelle. Pourquoi aurait-elle droit à quelque chose.... Heureuse.... Oui c'est ça le terme n'est-ce pas ? Une histoire heureuse. Elle secoue la tête et étonnamment, un sourire passe sur ses lèvres. La perspective que quelque chose de bien puisse arriver la rend heureuse. C'est bizarre comme sensation, c'est un peu inédit. Mais sa joie est de courte durée lorsqu'elle sent la plage trembler. Elle regarde vers Sileas et est prête à lui poser la question quand finalement les murs se mettent en place.

Le sable gonfle, il grandit et se solidifie pour former un mur. La jeune femme tente de passer de l'autre côté avant que celui-ci se referme, mais rien a faire, elle est directement repoussé et elle tombe lourdement sur le sable dur, son regard braqué sur ces murs de sables qui l'entourent désormais. Un regard à droite, un regard à gauche et la voix qui s'élève. La technomancienne rage, elle tente de se connecter à la matrice, mais il n'y a aucune connexion ici, il va falloir qu'elle se débrouille sans ça. Pourtant, elle n'hésite pas à frapper le murs de sable de ses deux poings, fait saillir ses griffes pour l'entamer, mais il se reforme automatiquement et la voix reprend sa mélodie, comme un avertissement vengeur. Raz le bol des psychopathe, elle s'en est choppé un depuis son enfance et voilà maintenant qu'un autre tentait de lui retirer un moment bien-être, non mais sérieusement. Elle tapa encore un temps sur le mur de sable qui lui barrait le chemin vers Sileas, un coup de poing rageur qui fit voler quelques grain de sable et lui brisa un doigt visiblement. Grognant de dépit, et de douleur, elle se concentra de nouveau. Elle était une combattante, on y avait bien veillé depuis qu'elle était petite, elle n'avait pas à s'en faire, mais pour les autres... Elle entendit d'ailleurs le cri d'une jeune femme qui semblait appeler quelqu'un. Ouais, pour les autres ce ne serait pas la même chose.

« Sil, je sais si t'es là, mais si t'es là j'espère que tu vas bien. Je vais tracer mon chemin pour voir ce qu'il se passe. Fais attention à toi s'il te plaît. »

Et elle partit sans trop se poser de question, déchirant un morceau de son tee-shirt pour bander son doigt et le faire tenir grâce au lacet de cuir dans ses cheveux. Ça n'allait pas être simple, mais elle se félicitait d'avoir acheté ce tee-shirt pour mettre au dessus du maillot de bain. Mais qu'est-ce qu'il se passait dans cette plage bordel et s'était quoi ce son entêtant d'un cœur qui battait en rythme régulier avec le roulis des vagues. Cela faisait pas mal de question qui n'avait toujours pas de réponse et ça agaçait prodigieusement la blonde. Elle secoua la tête et une fois son bandage improvisé, elle se dirigea vers un coin plus lumineux du couloir. Pour l'instant, il n'y avait rien de particulier, il ne s'agissait que de meurs, cependant grâce à son amélioration de vue, elle pouvait voir qu'au bout du couloir il y avait quelque chose et d'ailleurs, plus ses pas avancés, plus elle voyait apparaître de choses sur les murs. D'abord, des coquillages, ensuite des lianes d'algues. Plus ça allait et plus cela représentait comme une tapisserie et elle avait un peu peur de trouver quelque chose au bout qui n'allait pas lui plaire, mais alors pas lui plaire du tout.

« Mais qu'est-ce qu'il se passe bon sang... Qui êtes-vous.... »

Note pour elle-même, surtout ne pas poser de question quand on est pas certain de vouloir la réponse.