Night Time, My Time

Kirill Lvov & Auxilia Zaslavsky

AX9 adorait l’ambiance des nightclub sans réellement pouvoir l’expliquer. Bien sûr, il y avait les jeux de lumières quasi-épileptiques, son péché mignon, ou son défaut de fabrication, c’est selon. La musique n’avait pas plus d’impact sur elle que cela, c’était comme un bruit de fond complexe avec une moyenne de 130 bpm, quelque chose de constant et donc de plaisant. La masse organique qui s’agitait au rythme de la musique et des lumières était fascinante : en analysant le visage et les émotions des gens, AX9 arrivait à la conclusion que pour ces personnes qui buvaient & dansaient, il n’y avait plus d’hier ou de lendemain, il n’y avait plus que maintenant.

Adossée à l’un des nombreux comptoirs du club, AX9 générait quelques données supplémentaires sur les lieux : en termes organiques, elle s’ennuyait et attendait quelqu’un, son partenaire Blade runner pour la mission de ce soir. La mission était facile, la mission dans la mission l’était un peu moins. Un opérateur Blade runner avait un comportement douteux, Auxilia devait se faire passer pour une nouvelle machine et tenter d’en apprendre plus sur son équipier. AX9 avait été programmée pour duper, mais bizarrement et à son grand étonnement, la vérité n’avait pas été effacée. Elle avait pourtant voulue que sa mémoire soit effacée, afin qu’elle paraisse plus crédible auprès de son partenaire. Les ordres avaient été claires, mais elle craignait que sa programmation entre en contradiction avait ce qui lui avait été dit auparavant : en gros, elle craignait la compromission.

L’homme se pointa peu après minuit, jouant des coudes pour se faufiler jusqu’au comptoir où se trouvait Auxilia. La quantité d’informations qu’elle avait absorbée les jours précédents lui permettait de le reconnaitre instantanément et ses yeux jusqu’alors immobiles s’animèrent pour suivre du regard l’inspecteur qui s’approchait d’elle.  « Comptez-vous m’offrir un verre ? » dit-elle d’une voix bien trop humaine pour une machine. Le Gumn se mit à fixer le Blade runner. « A 009AX, mon activation a été autorisée avant-hier, c’est… Elle s’arrêta un instant, fixant ses poings qu’elle serrait et desserrait, ma première mission. » Regarder ses poings comme si c’était la première fois qu’elle les voyait l’amusait. Elle regrettait presque de ne pas être un modèle d’infiltration plutôt que Black Ops. « Je sais déjà tout ce que j’ai à savoir sur vous inspecteur Lvov, mais… Vous a-t-on mis au courant de ce que l’on attend de vous ? Un petit deal a été mis en place avec le capitaine. » Elle laissa passer un instant avant de poser deux doigts près de son oreille et de reprendre : « Téléchargement du briefing en cours, donnez-moi le signal inspecteur Lvov, et je pourrais commencer. »

@Kirill Lvov Désolé au passage, mon "j'ouvre le RP demain" s'est transformé en "semaine prochaine", sorry pour l'attente :)

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Kirill Lvov & Auxilia Zaslavsky

La boîte de nuit était gorgée de monde. Les russes n’ont pas leur pareil pour faire la fête, et c’était les festivités du nouvel an qui battaient leur plein. On aurait pu croire qu’avec la fin du monde les gens songent un peu moins à s’amuser mais c’était tout le contraire. Ces bouffées d’air frais, ces bulles où tout était possible, où tout paraissait permis, connaissaient un succès sans faille. Les citoyens s’amusaient, buvaient beaucoup, oubliaient en dansant sur une musique aux goûts douteux. La musique électronique avait prit le pas sur toutes les autres, et les sons reconstruits par ordinateurs se ressemblaient tellement à la fin qu’on ne parvenait plus vraiment à distinguer la différence entre chaque morceau. C’était idéal entre les rayons de lumière, la musique, et l’ambiance pour se droguer. Et à ce titre, le blade runner passait inaperçu.

Quand on lui avait donné son ordre de mission en lui précisant qu’il ne serait pas seul, il avait déjà commencé à ronger son frein. Il détestait qu’on lui dise quoi faire, et chaque fois qu’il allait dans le QG des Blade Runner il sentait déjà la colère effleurer. Et puis, il y avait cette affectation, on lui collait quelqu’un dans les pattes, quelqu’un ou plutôt une machine. Pas de précision à son sujet, pas plus que sur la mission non plus. Un doppelganger à attraper dans une boîte de nuit. Facile non ? avait dit le chef en lui faisant un geste pour qu’il décampe. Kirill n’avait pas demandé son reste. Il détestait cet endroit, le QG, on aurait dit une énorme boite de conserve en pierre. C’était humide, obscur, et ça sentait toujours bizarre. A peine sorti, il avait commencé à ronchonner. Une mission facile où il n’était pas seul, ça sentait pas bon. Pas bon du tout.

Parvenu au bar, Kirill était déjà à moitié ivre, avec un pétard dans le sang. Il tenait encore debout, avait l’œil vif, peut-être un peu trop, et abordait une mine peu réjouie. Sourcils froncés, il adressa un regard noir à la petite nenette qui l’aborda au bar. Si ça avait été une belle nana lui faisant de l’œil, il aurait eu une autre réponse, quoi que il était de mauvaise humeur, mais il compris assez vite qu’elle n’était pas là pour le draguer. Elle lui déclina son matricule, comme ça, au beau milieu du bar. Savait-elle ce qu’elle risquait si ça tombait entre les oreilles d’un nouveau barbare ? « Un verre, je pense pas qu’ils servent de l’huile de moteur par ici. » répondit-il comme le superbe connard qu’il était. Après tout, elle l’avait bien cherché non ? Peut-être qu’elle n’avait pas choisi sa mission, mais elle prendrait pour son chef et les autres.

Le jeune homme la regarda d’un œil encore plus noir, si cela était possible. Elle en savait plus que celui, ce qui avait le don de l’agacer superbement. Plus encore qu’il ne l’était. Elle avait accès à son dossier et à celui de la mission. Kirill ne la voyait pas comme un ordinateur ambulant, ce qu’elle était dans les faits, mais plus comme ce qui allait le remplacer lui et les autres. Parce qu’un robot n’exigeait ni salaire ni bon traitement, ils prendraient irrémédiablement leur place. Kirill broyait du noir comme beaucoup de ses collègues en voyant les machines les aider dans leurs missions. « On m’a juste dit que notre cible serait ici. » fit-il d’un air sombre en attrapant un verre de vodka qui trainait là sans se soucier de qui pouvait l’avoir commandé. « Allez-y. » lâcha-t-il en détournant le regard. Il cherchait des yeux la cible, d’après le signalement donné, notamment la présence d’un tatouage, il espérait pouvoir clouer le bec à cette machine en lui prouvant qu’il n’avait pas besoin de son brieffing.

@Auxilia Zaslavsky no soucis, t'inquiète pas, ton ouverture est parfaite !

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Comme elle ne parvenait à déterminer lorsqu’une musique se terminait et une autre commençait, AX9 se demandait si cela venait d’elle ou si même les organiques considéraient ce style de musique tout à fait monotone. Bientôt, elle n’y fit plus attention, elle orienta ses capteurs audio sur la voix de Kirill et procéda aux traitements des informations. Il ne lui fallut pas longtemps pour déterminer du sarcasme, chose apparemment habituelle chez l’inspecteur si l’on en croyait son dossier. Elle activa tant bien que mal quelques mécanismes complexes au niveau des lèvres pour simuler un sourire, mais comme le reste du visage ne suivait pas, elle avait l’air absolument terrifiante sans même le faire exprès. Presque aussitôt, elle se rappela qu’elle devait passer pour un nouveau modèle et finit par s’exprimer naïvement. « Inspecteur, il semblerait que votre état soit considérablement altéré par, selon mes capteurs, un mélange d’éthanol et de tétrahydrocannabinol : je n’ai évidemment pas besoin de l’huile que vous suggérez ! »

L’inspecteur Lvov affirma qu’il savait que la cible se trouvait ici. C’était vrai, preuve qu’il n’était pas totalement déconnecté du monde réel avec les substances qu’il avait ingéré. En revanche, on ne lui avait rien dit sur le petit marché qu’elle avait passé avec le capitaine, tant pis, ça lui fera la surprise.
« Inspecteur Lvov, il vous est demandé à la fin de la mission d’établir un cours bilan sur mon efficacité. Je suis un nouveau modèle, un avis organique est requis afin de déterminer si mon état actuel est conforme aux attentes Blade Runner. Pardonnez mon audace mais… En êtes-vous seulement capable ? » Elle, ne questionnait pas son statut d’inspecteur, mais bien évidemment son état d’ébriété avancé. En réalité, cela n’importait peu, mais AX9 faisait le nécessaire pour maintenir l’illusion de son activation récente. L’homme la regardait comme s’il voulait la débrancher. L’irascible détective ne lui facilitait pas la tâche, et rien qu’avec ça, la mission devenait un peu plus compliquée. AX9 passa au briefing qu’elle avait promis plus tôt, sans même considérer les gens autour qui en tendant une oreille, pouvait tout entendre : elle devait jouer le rôle d’une nouvelle machine relativement peu à l’aise avec les interactions humaines, elle allait jusqu’au bout. « Nous cherchons un doppleganger, véritable identité, Anatoly Maximov. Son usurpation d’identité constitue déjà un crime, mais Maximov est également un sympathisant Dvoïnik : il facilite le déplacement de mutants grâce à des moyens que nous ne connaissons pas encore -ceci constitue d’ailleurs un objectif secondaire-. » Elle s’arrêta un instant, car elle voyait bien qu’elle débitait trop vite : il lui semblait que l’inspecteur Lvov plissait des yeux et se frottait le crâne, ce qui correspondait souvent aux symptômes d’une migraine. « Maximov met en danger nos bons citoyens Moscovites, il est primordial de le neutraliser ce soir avant qu’il ne s’échappe de nouveau. »

Maximov n’existait pas. Il s’agissait en vérité d’un Blade Runner qui n’avait eu d’autre choix que de se plier aux exigences de l’Autorité de revêtir une nouvelle apparence et de se faire passer pour un criminel. On lui avait promis une augmentation de son salaire et des améliorations cybernétiques, mais personne ne lui avait rien dit concernant les risques potentiels qui pourraient éventuellement lui coûter la vie. AX9 se redressa et joignit les mains en regardant Kirll. « Comment commenceriez-vous l’enquête inspecteur Lvov ? »

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Elle, une machine, lui faisant la morale. Décidément, les hautes instances de ce pays en avaient de l’humour, et une manière de vous remercier pour des années de loyaux services ! Ok il n’avait pas été l’agent le plus honnête du monde, mais bon sang, il faisait leur fichu boulot, leur sale boulot. Il n’y avait pas d’autres mots pour qualifier son job. Livrer de pauvres gus aux mains de docteurs Frankenstein en herbe, où ils pourraient se la rejouer camp de concentration… il avait les mains pleines de sang, du sang qu’ils avaient fait gicler. Oh bien sûr, ils ne se salissaient pas les mains eux-mêmes, ils payaient d’autres pour le faire. Les choses ne changeraient jamais. Oui, il frisait l’acholique et alors ? il lui fallait bien ça pour se supporter, pour continuer. « C’est tout à fait ça, mon huile de moteur à moi. » rétorqua-t-il en levant son verre pour ingurgiter son contenu cul sec.

Se retrouver avec une machine, tôt ou tard, il savait que ça finirait par arriver. Il avait entendu parler de ces machines, des anciens soldats, des mercenaires parfois, d’anciens blade runner abattu pendant le service qu’on retapait comme si c’était une bagnole et dont on transférait la conscience dans un corps de métal. Kirill demeurait méfiant envers tout cela. Pinxit contrôlait ces machines, les fabriquaient. Au fond, cette poupée devait être un esclave dont le sort n’était guère enviable à celui des dvoïniks qu’il jetait dans un trou et dont il scellait le sort, pourtant, il n’éprouvait pas de remords, ni d’empathie. Impossible s’il voulait survivre. Il l’écouta en scrutant le fond de son verre vide. « Intéressant, me voilà promu professeur. J’imagine que le salaire ne va pas être plus élevé pour autant. » râla-t-il sans soulever la question assez insultante qu’elle lui avait posé. Ok il était ivre mais il était toujours opérationnel avec 4 grammes dans les veines. « La question ma jolie c’est pas si j’en suis capable, c’est est-ce que tu vas supporter cette mission à mes côtés. Les palpitants ont du mal, mais toi, avec tes zéro et tes un, j’suis pas certain que tu puisses suivre. » la tacle-t-il en se relevant de son tabouret et regardant la salle bondée de monde.

Avec ses yeux bioniques elle parviendra sans doute à distinguer leur cible mais comprendra-t-elle seulement comment il faut agir ? Saura-t-elle deviner le comportement de la cible avant qu’il n’agisse ? Tout dépendait de ce qu’ils lui avaient laissé comme souvenir, de ce qu’elle avait été avant. « Je me demandais, ils vous effacent la mémoire ? Ou bien tu te souviens de ce que c’était, d’être vivant ? » Il est mesquin, méchant. Cela le galvanise. Comme une dose de drogue se diluant dans ses veines. Il aimait ça, le doux parfum sulfureux de la douleur. Elle ne la ressentirait sans doute pas, mais c’était quand même bon de pouvoir se lâcher. Tant pis s’il se tapait un sale rapport. De toute façon, il était déjà grillé auprès de sa hiérarchie. Bordel, il était ivre avant même de commencer la mission !

Le portrait de la cible était assez séduisant, le genre de bonhomme qui sait profiter pleinement des possibilités qu’offre la vie. Kirill ne put s’empêcher de sourire même si le rythme et la voix haut perché de la machine lui collait un mal de crâne douloureux. Il n’avait pas assez bu ou alors trop, au choix mais il avait décidément besoin d’un remontant. Il la regardait du coin de l’œil. « Déjà en prenant de quoi tenir toute la nuit, toi t’es une machine, t’as juste besoin que tes batteries soient chargées. Les miennes ont besoin d’autre chose que d’électricité. » Là dessus il ouvre sa veste, sort son porte feuille, en tire une boite en métal contenant tout l’attirail du parfait junkie. Et sur le comptoir et l’œil médusé voire courroucé de la poupée de métal, il se tape un rail. Puis il renifle, en rangeant le matériel et se tourne vers elle. « C’est une affaire délicate et on me colle une newbie en pleine formation ? Parfait ! » s’exclame-t-il en se levant. Il titube un bref instant, la coke n’a pas encore fait son effet. Puis il le sent, la montée au cerveau, les lumières plus claires, les pulsations de son cœur plus rapides.

« Un type comme ça doit nécessairement avoir accès à un réseau, des connexions. Je parie qu’il est en lien avec la Bratva. » fait-il en la regardant dans les yeux. « Ça tombe bien, moi aussi. » ajoute-t-il en lui faisant signe de le suivre. Il n’a pas l’intention de lui faire un court théorique uniquement. C’est sur le terrain qu’ils sont, il va falloir qu’elle suive le rythme. Il s’empresse de se diriger vers l’étage où se situe les bureaux de réceptions de la Bratva délivrant plaisirs et réjouissances ici bas. Autrement dit un petit salon privé rempli de pute, de coke et d’hologrammes qui vous collent immédiatement un mal de tête douloureux à moins d’avoir prit de la drogue juste avant. « Vous avez déjà croisé leurs membres ? Non ? Restez alors silencieuse, je m’occupe de tout. »

@Auxilia Zaslavsky désolé j'ai fait un pavé... je me suis emballée.

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L’état dans lequel il était constituait probablement  déjà un motif suffisant pour le faire arrêter. Tout le monde au QG semblait être au courant cependant. Mais AX9 n’était pas là pour ça, il fallait creuser d’avantage. Le faire parler semblait relativement facile. Là où le Gumn répondait par des oui ou des non, Lvov aimait bien agrémenter ses réponses de pointes d’humour et/ou de sarcasme. Si tout se déroulait comme prévu, AX9 rentrerait à la base avec suffisamment d’informations pour avancer cette étrange enquête sur un homme qui l’est tout autant. Comme elle s’y attendait, il réagit plutôt mal à son rôle de tuteur imposé. Il était évident que Lvov préférait travailler seul. Lui coller un agent humain devait déjà être désagréable, alors une machine, l’idée même devait lui être insupportable. Elle put afficher un sourire complet cette fois, sans doute parce il était sincère : son programme humoristique avait saisi l’ensemble de la remarque de l’inspecteur. À son tour, il émit ses doutes quant à la possibilité d’AX9 de suivre le rythme qu’il va imposer. Néanmoins, elle ne résolut pas immédiatement si le « jolie » était une appellation affectueuse ou si sa carapace plaisait vraiment à l’inspecteur. « Permettez-moi d’écarter ce doute immédiatement : je suis un modèle d’intervention, la rapidité ne posera pas un problème. » Elle ne comprit pas tout de suite que Lvov ne parlait pas spécialement de ses capacités physiques mais plutôt de ses capacités cognitives : il avait parlé de 1 et de 0.

De manière tout à fait inattendue, il la questionna sur « l’autre ». Normalement, elle ne parlait que de ce sujet lors des sessions avec Kitsyne. Lvov était-il un homme curieux ? Ou s’agissait-il encore d’une provocation pour avancer une suprématie organique ? Dans tous les cas, cela la paralysa, elle alla jusqu’à oublier de se concentrer sur la mission et ce qu’on attendait d’elle. Peut-être sans vouloir, elle décida de répondre avec sincérité, mais peut-être que cela pouvait mettre (un tout petit peu) Lvov à l’aise dans ses interactions avec la machine, peut-être même qu’il pourrait lui faire confiance si elle répondait honnêtement pour une fois. « Il ne reste que très peu de choses. Les souvenirs de l’autre, le soldat, relèvent de l’ineffable. » Elle s’arrêta un instant, fixant Kirill dans les yeux de manière insistante. « Je suis vivante. Vous êtes vivant. Nous sommes tous les deux vivants mais de manière différente. » Et c’était vrai, AX9 se sentait réellement vivante. Le métal et la chair ne suffisait pas pour définir ce qui était vivant ou pas.

Probablement satisfait ou déçu de la réponse d’AX9, au choix, l’inspecteur se mit au travail à sa manière. Il avançait que les substances qu’il prenait étaient nécessaires au bon fonctionnement. Le rituel suivant fut tout à fait honteux, cet homme ne faisait pas honneur aux Blade runner, mais AX9 se garda de faire tout commentaire, et se concentra plutôt sur la forte résistance de l’inspecteur avec tout ce qu’il avait pu boire, fumer ou même priser à l’instant-même. « Chlorhydrate de cocaïne maintenant ? Ma base de données suggère qu’il ne s’agit en aucun cas de quelque chose qui puisse recharger des batteries, si je peux reprendre vos termes. » Elle le connaissait un peu mieux, elle savait que ce genre de commentaire allait l’énerver. De plus, il ne comprenait pas pourquoi une nouvelle machine devait l’accompagner pour cette mission. Elle ne répondit pas, mais elle traitait des informations à toute vitesse. En terme organique, elle réfléchissait. Quel homme étrange. Cette histoire de puce XX20087419-XK7 qui secouait le QG ressemblait finalement de moins en moins à une défaillance.

Lvov révéla ses liens avec la Bratva. Cela ne la choqua pas plus que ça, beaucoup d’inspecteurs trempaient dans le milieu de la pègre, une source d’informations et d’alliés supplémentaires.  Elle n’eut pas d’autre choix que de le suivre. Il l’emmena dans une pièce relativement isolée du reste de l’établissement, un endroit plus sombre et plus secret.  Lvov lui ordonna de rester silencieuse, elle acquiesça, restant même un peu en retrait. Des hommes et femmes à l’allure patibulaire cessèrent temporairement leurs activités pour observer le duo pénétrer dans le salon privé. Kirill s’approcha d’eux avec l’intention de leur parler mais une espèce d’alarme retentit en émettant deux courts « bip » : ils venaient de détecter le corps entièrement métallisé d’AX9, trahissant ainsi son statut de Gumn. « Elle reste dehors, je ne veux pas de ça ici » déclara l’un des hommes. Il avait le crâne rasé et portait un cache-œil cybernétique. « Ma présence ici est non-négociable, répliqua AX9. Estimez-vous chanceux que je ne décide pas de tous vous arrêter sur le champ ! » L’ambiance devenait tendue, mais c’était voulu : AX9 voulait voir si Lvov choisirait le camp des malfrats ou si sa loyauté envers les Blade Runner subsistait encore.


@Kirill Lvov : Ben c'est pas grave, ça veut dire que t'as des choses à dire ! Et du coup, un pavé appelle un pavé ^^

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Kirill eut un petit sourire mauvais en voyant qu’il avait touché juste. La question sur ses souvenirs parue activer quelque chose en elle, remuer quelque chose. Cela voulait dire qu’il y avait quelque chose à l’intérieur de tout ce métal et de tous ces logiciels perfectionnés. Il n’était pas certain que cela le rassure. L’idée qu’il puisse un jour finir comme cela, devenir la propriété de Pinxit Industrie… cela lui tirait un frisson glacé. Il savait qu’il n’y avait rien qu’il puisse faire pour s’en protéger. Peut-être devrait-il lui demander ce que cela faisait, ce que c’était, pour se préparer au cas où. Mais il n’y aurait sans doute jamais de cas où si ce qui lui arrivait était bien une déchirure, si son destin était de retrouver sa sœur dans les camps de régression. Il doutait qu’on lui destine un corps de métal. Il n’était pas assez bon pour cela.

Un rictus apparu sur ses lèvres alors qu’elle le regarda droit dans les yeux en disant qu’ils étaient tous les deux vivants. Le même frisson glacé le saisit. Avait-elle consciente de ce qu’elle était, de ce qu’elle avait été ? Et si oui, éprouvait-elle la même sensation d’horreur que lui en y réfléchissant ? Peut-être que ce n’est qu’une question de karma. Elle avait dit soldat, elle avait dû tuer des gens, pas vrai ? Il soupira. Mieux valait ne pas songer ainsi, ne pas songer au passé, ni même au futur, seul l’instant présent comptait. « Vivants hein, pas certain qu’on le reste. Tout ça, ce dôme, cette enceinte de protection, ce n’est que temporaire. Le vent, le temps, finiront par tout avaler. » conclua-t-il en détournant les yeux et décidant de s’intéresser plutôt à leur affaire.

La remarque qu’elle fit sur le rail qu’il s’enfila le fit sourire, jaune, bien entendu. Il commençait à se demander si elle était là pour être formée ou pour le juger. « J’ignorais que je devais passer un quelconque examen d’inspection. » releva-t-il en la regardant avec des yeux sombres. « Si tel est le cas, il y a une procédure à suivre. » Insista-t-il en levant un sourcil et croisant les bras. La Russie était le berceau de la révolution bolchévique dont les traces perduraient encore, comme les logements offerts aux travailleurs ou encore les droits que possédaient ceux-ci. Des droits qui pouvaient cependant très vite disparaître si l’on considérait que vous étiez un dvoïnik, évidemment.

Tendu, le blade runner l’entraina au salon privé où le parrain de la Bratva tenant ce lieu recevait ses invités, ses collaborateurs et clients. D’ordinaire, il était plutôt bien reçu compte tenu du fait qu’il avait toujours été arrangeant et qu’en plus, c’était un consommateur. Mais la présence de la machine à ses côtés, une fois repérée, compromettait la rencontre et les liens de Kirill avec la Bratva ce qui le dérangeait profondément. La machine n’avait pas l’air d’être conciliante le moins du monde. « Personne ne va arrêter personne. » répliqua Kirill d’un ton autoritaire. « Vous êtes ici pour apprendre, ce n’est pas à vous de prendre de telle décision. » lui rappela-t-il. « Vous devriez savoir l’importance d’avoir des informateurs, et du fait qu’il faille les bichonner. Ou alors faut que vous retourniez en classe ! » railla-t-il.

Kirill n’avait pas l’intention de renoncer à cette entrevue, ni l’envie de la laisser à la porte. En vérité, il craignait qu’elle ne soit vraiment envoyée pour une inspection. Si tel était le cas, mieux valait qu’elle le voit et l’entende traiter avec la Bratva plutôt qu’elle tire de mauvaises conclusions. Personne n’aime se voir mis à la porte, et il commençait à se demander si elle n’était pas capable de ressentir une chose telle que le ressentiment. « Ce n’est qu’une élève. Mais si on la laisse à la porte, elle n’apprendra pas les bonnes manières de travailler, et l’immense bienfait de la collaboration entre nos services. » fit-il au parrain en lui adressant un clin d’œil. « Evidemment, nous comprenons que vous soyez frileux, nous allons vous montrer que vous n’avez rien à craindre de nous. »

Evidemment, les mafieux avaient toutes les raisons du monde de ne pas vouloir d'elle avec eux, et peu de raisons d'accepter. Mais Kirill savait qu'il était aisé de les convaincre s'ils étaient tous les deux désarmés. Restait à savoir si elle lui obéirait. Mais si elle prétendait être ici que pour apprendre, elle obéirait. Si elle refusait, cela voulait dire qu'à terme Pinxit envisageait que ça soit leurs machines qui mènent la danse, ce qui amènera probablement les blade runner à la rébellion ou du moins à la grève générale. Kirill tenta le coup, il se tourna vers elle et lui demanda, même si c'était pas vraiment une demande. « A 009AX veuillez laisser vos armes à ce gentil monsieur. » fit-t-il en désignant un malabar à l’air mauvais. Lui-même se délesta de son arme de service, bien sûr, il lui restait encore un couteau rangé dans un fourreau à sa cheville.

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AX9 fut surprise lorsque Kirill s’improvisa philosophe. Cette plaidoirie sur le destin était typiquement organique. La valeur du temps ne représentait plus grand chose pour Auxilia, elle était persuadée qu’après la disparition du dôme, la venue du vent, les effets du temps que décrivaient l’inspecteur Lvov, elle serait encore là, à regarder son cadavre et celui des autres. Elle en conclut qu’avec le nombre de stupéfiants qu’il prenait et cette témérité qui le caractérisait, Kirill n’avait pas peur de la mort, il avait peut-être même hâte de l’être. Avec la programmation adéquate, il pourrait faire un bon Gumn. Comme souvent, AX9 se contenait d’acquiescer pour faire celle qui apprenait au lieu de faire celle qui contestait. Évidemment, il était agacé par les remarques d’AX9 quand à son état altéré. Il semblait vouloir dire que ce n’était ni le moment, ni l’endroit et certainement pas à elle d’effectuer de tels examens. « Oh cela n’a jamais été mon but inspecteur Lvov, j’essaye simplement de… comprendre ? » Essayait-il de cacher quelque chose ? Dans tous les cas, la plateforme AX9 n’était pas suffisamment équipée pour effectuer des examens approfondis : ses capteurs, bien que développés, ne permettaient seulement d’analyser que la surface des organiques.

La Bratva faisait bien plus que tolérer la présence de Kirill : il était accueilli comme un ami, un partenaire, un client peut-être ? Pas sûr que ce détail soit important à insérer dans le rapport qu’elle remettra au QG, elle se contenait d’observer et de scanner silencieusement la puce de chacun : beaucoup d’entre elles ne correspondaient pas à leur propriétaire. L’inspecteur Lvov inclina vivement AX9 à calmer ses ardeurs justicières : une approche diplomate ? Intéressant. Comme à son habitude, il ne put s’empêcher de lui lancer une petite pique, elle commençait à s’y habituer désormais.
Par la suite, il trouva les arguments nécessaires à la justification de sa présence ici puisque les mafieux échangèrent quelques regards avant de faire un signe de tête discret. Le charisme du Blade Runner était à noter. Même s’il avait souhaité ne pas le faire, elle se désarma, car sa programmation exigeait qu’elle obéisse aux ordres d’un blade runner organique. Elle déposa lentement son fusil à pompe au sol et lâcha le bâton de service avant de croiser les bras. Ses poings de fers constituaient une arme, mais elle se voyait mal détacher ses membres, ça risquait de mettre tout le monde mal à l’aise.

Soudain, une sensation désagréable la parcourra.  Ses doigts se mirent à trembler, tous ses capteurs tremblèrent et pour la première fois depuis longtemps, elle ressentit de la douleur et se rappela ce que c’était d’être Gumn de troisième génération. La sensation était désagréable et indescriptible pour un organique, le tout semblait provenir de la puce située sur sa nuque. AX9 rassembla ce qui lui restait de force pour communiquer avec l’inspecteur Lvov. « Inspecteur Lvov… Je suis… Compromise… Je suis en train de me faire… Pirater… » AX9 se courbait de douleur, ses yeux changeaient constamment de couleurs sous le regard surpris des mafieux qui ne semblaient absolument pas être les responsables  de ce piratage. « Source localisé… Kirill, c’est lui ! » Avant de s’effondrer sue le sol, elle pointa du doigt un homme légèrement en retrait par rapport au reste du groupe, assis sur un canapé avec ce qui ressemblait à une tablette entre les mains. Tatouage au cou, lunettes noires et cheveux long, il ressemblait trait pour trait à Maximov. L'homme au cache-œil regardait tout à tour AX9, Kirill et Maximov. « Personne n’a autorisé ça ! Qu’est-ce qui se passe ici ? Lvov qu’est-ce que tu mijotes ? Et toi, arrête-ça immédiatement ! » dit-il en pointant du doigt Maximov qui se contenait de faire non de la tête.

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Lvov se contenta d’ignorer la Gumn. Elle prétendait ne pas être là pour une inspection, mais il commençait à douter de sa bonne foi. Après tout, elle ne dirait que ce pourquoi elle avait été programmée pas vrai ? Mentir, dire la vérité, ce n’était qu’une question de chiffrement pour elle. Il était donc impossible de savoir s’il pouvait lui faire confiance, et la réponse serait probablement non. Elle appartenait corps et âme à Pinxit Industrie et Kirill avait apprit assez jeune que ceux d’en haut ne pensaient qu’à leur gueule. Tant que vous représentiez un intérêt pour eux, ils vous laissaient tranquille, mais dès que vous montrer une quelconque volonté de rebellion, c’était la chute alors. Il n’avait pas envie de disparaître ou de finir comme sa sœur dans un camp. Il se battait pour survivre quoi qu’il lui en coûte, parfois le coût était trop lourd. Ces drogues, cet alcool, l’argent glissant entre ses doigts, ça le faisait tenir. Mais jusqu’à quand ? Il préférait ne pas y songer.

Quand on se retrouve au bord de la falaise mieux vaut pas regarder en bas, on risquerait d’être attiré par le vide. Kirill se sentait de plus en plus attiré par le vide, de plus en plus sur la pente descendante. Mais une fois qu’il aurait amorcé la chute, il n’y aurait plus rien pour le retenir. Il le présentait. Alors il s’accrochait à tout ce qu’il pouvait, il niait le vide sous ses pieds, il continuait à jouer les filles de l’air en espérant que quelqu’un, n’importe qui, le rattraperait, que la chute serait amortie, stopper, à temps. Même si c’était une illusion, une rêverie, un fantasme d’homme ivre au bord du rouleau. Mais ici, à Moscou, dans la grisaille glacée, il pouvait encore se bercer d’illusions, un bref instant avant la chute.

L’emmener là haut, au salon VIP, c’était peut-être suicidaire. Qui sait ? Kirill provoquait la chance, et valsait avec la mort, avec le danger et les absurdités de ce monde ci depuis trop longtemps pour comprendre qu’il avait peut-être surestimé ses capacités à contrôler la situation. C’était pourtant si bien parti. Une Gunm dans le saint des saints, le club de la Bratva. Il avait voulu la confronter directement à la situation lambda pour un blade runner mais elle avait failli provoquer une guerre ouverte avec la Bratva. Kirill dû jouer des coudes et négocier afin de calmer tout ce petit monde qui s’excitait bien trop vite à son goût. Il avait remarqué assez vite qu’à défaut d’être quelqu’un d’honorable il était doué pour négocier. Ce qui était après tout la base de son job. Torturer des gens pour obtenir des informations ça fonctionnait qu’à moitié et généralement les infos étaient moisies, et votre enquête compromise. Mieux valait fermer les yeux sur certaines choses si on voulait que le job soit fait. Mais ça, une machine telle que celle l’accompagnait ne pouvait concevoir une chose pareille. Ce qui inévitablement, allait poser problème.

Une fois les armes remises aux malabars assurant la sécurité des lieux, Kirill se détendit. Ils n’allaient pas mourir ici ce soir. Alors qu’il s’avançait vers le parrain, voilà que AX9 commença à buger sérieusement. Il mit du temps à comprendre ce qu’il se passait, n’ayant pas l’habitude des machines encore moins qu’elles soient défectueuses. Il savait pourtant, que la Bratva savait faire ce genre de choses. Il n’imaginait pas qu’ils puissent s’attaquer à une Gunm de troisième génération en revanche. « Ce que je mijotes ? Tu déconnes Andrey ! C’est ton homme qui est en train de pirater ma coéquipière. » s’exclama Kirill en essayant d’avoir l’air plus féroce qu’il ne l’était. L’homme aux tatouages qui visiblement était l’auteur du piratage leur jeta un regard en coin. « Cette machine peut enregistrer notre conversation. » fit le pirate en guise d’explication. « Et ? » répliqua Kirill. « Vous croyez que ça n’a pas l’air encore plus suspect ? Comment croyez-vous que Pinxit va réagir en apprenant que l’un de ses derniers petits joujous se fasse hacker pile ici, dans le fief de la Bratva ? »

Ce que craignait Kirill c’est que les types d’en face n’aient envie de garder la Gunm pour eux. A lui seul, désarmé, face aux gorilles surarmés il ne ferait clairement pas le poids. La seule chose qu’il pouvait faire, c’est négocier. Leur faire peur, à défaut de se battre. Leur faire croire qu’il pouvait leur faire du mal. « Vous croyez quoi ? Elle a une puce GPS intégrée, et un système de sécurité de pointe. Si vous n’arrêtez pas ça, il y aura une descente ici dans quelques minutes. » Bien sûr, il bluffait. Même si cette machine coûtait effectivement des millions, Kirill doutait que Pinxit déploie une armée de Gunm risquant de se faire pirater à son tour. Ils se contenteraient probablement de la sacrifier et de renforcer la sécurité des autres modèles. Le pirate paraissait guère convaincu, mais le boss l’était. Il n’était pas du genre à vouloir foutre son domaine en l’air pour prouver qu’il avait raison. « Ok, Maximov tu arrêtes ça tout de suite. » puis il se tourna vers Kirill. « Par contre, elle sort immédiatement. Et toi avec. Je veux plus jamais revoir cette machine chez moi, Lvov, sinon tu peux dire faire une croix sur nos relations. » Le mafieux choisissait ses termes conscient que la machine même hackée pouvait encore transmettre des informations. Kirill s’estimant chanceux de sortir d’ici vivant hocha la tête acceptant la sentence. « D’accord, on sort, mais ton pote arrête son hacking tout de suite. » Le parrain insista. « MAXIMOV. » Ce dernier leva les mains de sa tablette en signe de rédition.

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Kirill Lvov & Auxilia Zaslavsky

Cela faisait partie du plan, évidemment. Jusqu’à présent, AX9 avait soigneusement enregistré les réactions de l’inspecteur Lvov, et le résultat final était plutôt positif. Mis à part son caractère unique et cette manie d’user des stupéfiants en grande quantité, elle ne comprenait pas pourquoi le QG avait ses doutes sur l’inspecteur. Cela faisait partie du plan mais cela n’empêchait pas le fait que ça soit extrêmement douloureux, la sensation serait difficile à expliquer à un organique. Dans le cas où Kirill ne tenterait pas de sauver AX9 de son triste sort, il était prévu que Maximov s’arrête. Mais elle fut particulièrement soulagée d’entendre l’inspecteur Lvov prendre sa défense : c’était ça qu’elle voulait analyser ; dans une situation pareille, Lvov favoriserait-il ses équipiers, qu’ils soient faits de chair ou de métal, ou bien serait-il capable de les abandonner au profit de ses alliés de l’ombre ? Dans son rapport, elle ne manquerait de mentionner qu’il avait préféré la première solution.

L’ambiance était tendue : le chef ne faisait ni confiance à Lvov, ni à Maximov. Encore quelques secondes à subir ces assauts incessants sur ses programmes et elle espérait s’en libérer. Les négociations devaient être rapides, et lorsqu’enfin le boss insista auprès du hacker, AX9 put effectuer un check-up complet de ses systèmes et reprendre le contrôle de son système. Elle se relevait tout doucement sous les regards des mafieux et de son coéquipier. La loyauté de Lvov n’était plus à remettre en question. Vraiment ? Le Gumn n’en était toujours pas certaine, elle voulait voir jusqu’à où il pouvait rester fidèle à ses engagements. Serait-il capable de négocier une nouvelle fois ? Sans lui laisser le temps de dire quoi que ce soit, elle lui adressa un regard sévère. « Contre-mesures déployées… » dit-elle avant de bondir vers Maximov, en trois grandes enjambées seulement. Elle passa son bras mécanique autour de son coup, prêt à lui briser la carotide. Évidemment, tous les hommes pointèrent leurs armes dans sa direction. « Lvov, dites-leurs qu’on a besoin de celui-là. » Elle interrogeait du regard son coéquipier. Puis elle s’adressa aux mafieux. « Scannez sa puce, c’est un blade runner, vous avez une taupe… » Maximov semblait être étonné, car évidemment, cela ne faisait plus partie du plan. Il se serait dans doute plaint si elle ne lui couvrait pas la bouche. AX9 était prête à risquer la vie d’un homme pour mener à bien cette mission. Un des hommes effectua rapidement un scan de la puce de Maximov et alla confirmer auprès de son patron les dires de la machine. Le boss était bouche-bée.

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Kirill jeta un regard furieux à la machine bondissante qui s’était juchée sur le hackeur sans même lui laisser le temps de faire ou dire quoi que ce soit. Il les voyait déjà une balle logée dans la tête, le corps jeté dans la Moskova. Le sien uniquement, cela va de soi, puisque celui de la Gumn sera probablement découpé en morceau, et les pièces récupérées. Il venait d’insinuer qu’entière elle constituait un danger, mais en pièces détachées, elle ne serait plus une menace, probablement serait-elle même une source d’informations précieuse ou du moins du gain de temps et d’argent. Et puis elle insinua que le hackeur était un blade runner. Il leva un sourcil.

Complètement dépassé par la situation, Kirill se contenta d’observer la scène avec des yeux ronds comme des soucoupes. Coké et alcoolisé comme il l’était, tout cela aurait pu être une hallucination du début à la fin, mais il était persuadé à 99% que tout ceci était réel. Même une hallucination n’aurait pu lui donner ce sentiment d’assister à un numéro parfaitement répété. Il avait douté de sa coéquipière dès le premier instant, mais là, il se demandait pourquoi un blade runner s’était fait passé pour un gros bras auprès de la Bratva et plus encore pourquoi s’ils le testaient avaient-ils prit de tels risques ? Le mafieux faisait à peu près le même raisonnement excepté qu’il ne savait absolument pas à quoi tout cela rimait. Tout ce qu’il constatait c’est qu’il s’était fait rouler et qu’il détestait cela.

« C’est quoi ce bordel ?! » s’exclama le parrain en braquant son arme sur Maximov puis sur Auxillia puis enfin sur Kirill qui paraissait aussi étonné que le boss de la bratva. « Sérieux mec, j’en sais rien pas plus que toi. » Il regarda la Gumn cherchant à comprendre quel était son plan car pour le moment la priorité était de sortir de là vivant. « Au risque de répéter mon vieil ami, c’est quoi ce bordel 009AX ? Dis moi que c’est un blade en roue libre. » lui demanda-t-il en insistant sur les derniers mots. Il se fichait royalement pour le moment de pourquoi un blade runner s’était retrouvé là, tout ce qu’il voulait s’était repartir d’ici entier et si possible sans bout de métal fiché dans le crâne ou nul part en fait.

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La réaction de Lvov n’était pas celle qu’elle avait espéré obtenir, mais ce n’était pas la pire non plus. Ce n’était cependant plus la peine de pousser plus loin pour analyser son comportement : à ce stade-là, AX9, Maximov et peut-être même Kirill risquaient d’y perdre la vie. La tension était à son comble, elle devait le convaincre maintenant ou tout abandonner. Dans tous les cas, elle aurait de quoi faire un rapport sur l’inspecteur. Le parrain était le plus nerveux, il se demandait s’il devait tenir AX9 en joue ou bien Kirill. AX9 n’avait pas bougé d’un centimètre, c’était l’avantage d’être une machine et de ne pas faillir sous le poids du stress, cela rendait moins nerveux les gens de la Bratva qui malgré la menace qu’elle représentait, apparaissait comme calme. Le Gumn n’hésita pas à prononcer les paroles que voulaient entendre Kirill si cela l’aider à prendre une décision. « Affirmatif. Vous devez avoir plein de question, mais elles attendront au debriefing… » dit-elle nonchalamment. Encore fallait-il pouvoir rentrer au QG. Et la suite ? Comment faire si Kirill se montrait beaucoup trop curieux ? AX9 essaya de ne pas trop y penser, elle savait qu’ils inventeraient certainement une histoire qui tiendrait la route et qui justifierait le départ soudain de Maximov.

Auxilia réfléchissait déjà à un plan de secours si tout ce ne passait pas comme prévu. Elle avait repérée l’arme de poing de Maximov laissée à quelques centimètres de lui. Elle pourrait le récupérer, se servir du corps de Maximov pour ralentir la progression de quelques balles puis répliquer avec le pistolet qu’elle aurait subtilisé. Cela risquerait de créer plus de problèmes qu’autre chose : d’autres Bratva pourrait rappliquer, Kirill perdrait la confiance de ses contacts et AX9 celle de Kirill. D’autres plans se généraient en tâches secondaires, mais la solution la plus simple était encore de sortir d’ici sans un seul coup de feu. « Agent Lvov, ces hommes ne me font pas confiance. Ils vous écouteront. Quant à vous, faites confiance à ma programmation…  Faites confiance aux Blade Runners. Elle jeta un coup d’œil au parrain et essaya tout de même de le raisonner. Nous vous rendons service. Ni plus, ni moins. » Cela ne lui plaisait pas du tout, mais tout reposait sur les épaules de Kirill, elle avait abandonné tout espoir de convaincre le parrain. Le pistolet était tout proche d’elle, elle n’avait qu’à tendre le bras…

Spoiler:

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La voix mécanique de AX9 avait quelque chose de rassurant. Parce qu’elle était l’élément fixe, statique, stable au milieu d’une salle pleine de tension qui pouvait exploser à chaque instant, parce qu’elle était une machine, et qu’elle ne risquait pas de craquer sous la tension, parce qu’elle était la seule à cet instant qui pouvait les sortir de là vivant. Kirill se demanda si elle ne lui répondait pas exactement ce qu’il voulait entendre, ce qu’ils voulaient tous entendre. Parce que l’autre option était une bombe à retardement. Mais en vérité, il se fichait qu’elle dise la vérité ou pas. Il lui avait demandé de mentir, quasiment, à sa manière, même s’il doutait qu’elle ai compris. Le principal était qu’elle avait saisit l’importance de ce qu’il se jouait, l’importance de tenir la ligne, de ne pas faiblir, de ne pas exploser en plein vol. Sa voix se fit entendre à nouveau, lui demandant implicitement de les sortir de là.

Et puis elle déclara au mafieu qu’elle leur rendait service, et de leur faire confiance. Kirill doutait qu’elle parvienne à les convaincre. Pour eux, elle n’était qu’un bout de métal, et ils ignoraient sa programmation exacte. Pour eux, elle pouvait tout aussi bien être là pour les espionner et la présence de ce Maximov ne venait que renforcer cette impression, ce doute, cette paranoïa toute russe. Ce parfum de névrose qui planait dans la mère patrie depuis des lustres, depuis que Staline avait prit le pouvoir. Kirill sentait la tension s’accumuler et former un poing nerveux et dur comme la pierre en haut de son dos, entre ses deux épaules. Il inspira, essayant de se souvenir de tous les instants de rares et maigre complicité avec le parrain, essayant de se remémorer des indices qui pourraient l’aider à le convaincre, à comprendre comment il pensait. Même si au fond, il le savait déjà.

« Parrain, AX9 a raison, nous ignorions la présence de cet homme ici, mais le fait que nous l’ayons repéré et que nous l’arrêtons ne peut que te délivrer d’un poids… » Aussitôt le parrain l’interrompit, brutalement, froidement, en plaquant son arme au creux de la nuque de Maximov. « Arrête ton barratin, tu sais parfaitement comment nous fonctionnons. Un traitre doit être exécuté. » Kirill leva les mains plus haut afin de rassurer le parrain mais aussi pour attirer son attention. « Pinxit va vouloir récupérer cet homme. Il a piraté l’une de leurs dernières créations. Tu as envie de t’interposer entre Pinxit et cet homme ? Peu importe ce qu’il est, si ça se trouve il a trahit Pinxit et pas ton organisation. » A nouveau le parrain l’interrompit. « Justement, le tuer serait plus simple. Il ne risquerait pas de parler. » Kirill devait admettre que le parrain n’avait pas tord. Il devait trouver une raison pour laquelle le parrain abandonnerait Maximov à Pinxit, une excellente raison. « Oui mais Pinxit resterait sans réponse. Et sans personne pour s’expliquer, qu’est-ce qui va les empêcher de tomber sur ta Bratva comme les sept plaies d’Egypte ? A leurs yeux tu seras responsables. » Le parrain secoua la tête. « Tu n’auras qu’à les baratiner comme tu essaie de le faire avec moi. Je te connais Lvov, tu es un type sympa, un bon payeur, mais tu es aussi vendu que je le suis, que nous le sommes tous ici. Tu n’a jamais eu à choisir entre quoi que ce soit. Mais ce jour viendra, ce jour est peut-être même arrivé. »

Merde, merde, merde ! Il ne savait plus quoi inventer. Le parrain n’allait pas lâcher Maximov aussi facilement. Pourquoi AX9 avait-elle ouvert la bouche ? Parce qu’elle ignorait comment fonctionnait la Bravta, parce qu’elle était un robot qu’on avait programmé qu’à moitié, que des laborantins avaient éduqués, des types qui sortent jamais de leur labo. Il soupira. « Très bien, fait ce que tu veux. Mais vient pas te plaindre ensuite si ton bar se fait dessouder par Pinxit. Tu sais parfaitement que j’ai aucun pouvoir sur Pinxit, je suis qu’un chien tenu en laisse, comme tes dealers n’ont aucun pouvoir sur toi. » Il jouait le tout pour le tout, relâchant la pression, s’éloignant d’un pas, gardant les mains bien en l’air, bien visible. Il se rapprochait de la porte, prêt à prendre la poudre d’escampette. Kirill n’avait jamais été très courageux et mourir pour un type qu’il connaissait pas, très peu pour lui.

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Dans une situation pareille, un organique aurait certainement pété les plombs. Cela ne voulait pas dire pour autant qu’AX9 n’avait pas besoin de se concentrer ou quoi que ce soit,  bien au contraire. À vrai dire, elle faisait un effort pour retarder la violence, solution simple et efficace qui résoudrait bon nombre de problèmes à la fois. Kirll était particulièrement calme lui aussi, mais c’était sans doute à cause –ou grâce- aux stupéfiants qu’il avait ingéré auparavant. Diplomate, il tentait une nouvelle fois de convaincre le parrain que l’extraction du faux agent double lui serait bénéfique, mais à chaque fois que l’inspecteur Lvov présentait un argument solide, le parrain le contrait immédiatement. Pour quelqu’un qui manquait soi-disant de courage –cela avait été établi sur son profil–, Kirill faisait preuve de bravoure. Pourtant, celui-ci restait campé sur sa position, en rien ne semblait pouvoir le faire changer d’avis.

« Il ne suffit que de ça ? Qu’il soit mort ? » intervint Auxilia. Ce n’était pas comme cela qu’elle aurait préféré que cela se termine, mais sa programmation avait été parfaitement claire : Maxivmov pouvait être une perte éventuelle dans cette mission. Sans un bruit, son bras mécanique appliqua une forte pression sur son cou, Maximov décéda immédiatement. Peut-être que quelqu’un chez Pinxit décidera qu’il sera réanimé en Gumn ? Sous le regard médusé de la Bratva, elle arracha la puce de Maximov et tendit l’objet ensanglanté à Kirill. « Inspecteur, peut-être que vous parviendrez à... baratiner le QG avec ça. Le parrain a l’air de croire en vous en tout cas… »  Elle finit par laisser tomber le cadavre encore chaud de Maximov et se dirigea enfin vers le parrain. « Votre traitre a été exécuté. Il ne parlera plus. Il me semble juste qu’en échange, nous puissions quitter cet endroit mon partenaire et moi sans qu’aucune autre mesure ne soit prise… Nous avons un marché ? » demanda-t-elle en rejoignant Kirill proche de la porte de sortie. Éventuellement, ils sortirent d’ici et se retrouvèrent dans les rues.

En chemin, AX9 scanna la puce et fit un debriefing oral à distance au QG. Elle n’en était pas trop sûre, mais il lui semblait que Kirill avait repris quelque chose, encore sous forme de poudre peut-être. Il ne s’attendait certainement pas à ce que la mission se termine de cette manière, si bien qu’AX9 se sentit obligé de lui parler une fois son debriefing terminé. « C’était un criminel, un traitre… Vous n’allez pas me faire croire que le destin de cet homme a un quelconque impact sur vous ? » Elle ne s’en rendait pas trop compte, mais elle sortait peu à peu de son rôle de nouvelle machine. « Je n’ai fait que suivre ma programmation… » dit-elle tout doucement en regardant le sol. Programmée pour le meurtre d’un camarade Blade Runner... Que se passerait-il si un jour on lui demandait de tuer Kirill ?

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Kirill resta scié devant la réaction de la Gumn. Elle arracha la puce du blade runner comme si c’était un cheveux. Le Maximov tomba sans un bruit, masse sans vie. Le parrain fut aussi surpris que le blade runner, mais il n’avait à se soucier de la vie de cet homme. En fait, il paraissait presque déçu que l’acte de tuer lui ai été refusé. Kirill lui digérait ce qu’il venait de voir. Il ne pouvait s’empêcher de se demander si ça avait été lui à la place de Maximov. Est-ce ainsi qu’on finissait lorsqu’on trahissait Pinxit en allait plutôt s’acoquiner avec la mafia ? Et s’il avait été en mission, en infiltration comme tout le laissait suggérer ? La puce contenait-elle les informations ? Ou Pinxit avait-il simplement envoyé cette Gumn pour éliminer le problème ? Pinxit devait préférer qu’un infiltré ne puisse rien dire, peut-être qu’elle avait reçu l’ordre de le tuer plutôt que de laisser la Bratva s’emparer du pauvre type envoyé à la mort.

Il dégluti péniblement. De quoi s’étonnait-il au fond ? Il en avait toujours été ainsi après tout. Il le savait, qu’il n’était rien de plus que de la chair à canon, sacrifiable s’il le fallait, sacrifiable à souhait. Même s’il avait du mal à l’admettre, il l’avait toujours su. Peut-être pas quand il était encore jeune et naïf, mais maintenant, il n’avait plus aucun doute sur le sujet. Personne n’était irremplaçable, personne n’était à l’abri, excepté Volkmar évidemment. Lui serait éternel, immortel. Raidi, il tendit la main pour récupérer la puce. Observer cet objet minuscule qui représentait tout ce qu’il restait de ce qui avait été un blade runner lui fit froid dans le dos, pourtant, au fond, il savait que pour ceux d’en haut, leur vie se résumait à cela. Une simple puce, un vulgaire bout de métal.

Tout le reste se passa trop vite, peut-être parce qu’il était sonné par ce qu’il venait de se passer et qu’il passa en mode pilote automatique jusqu’à ce qu’ils soient dans la rue et qu’elle lui adressa la parole. Alors, il revient à la réalité. Il dû constater que, contrairement à ce qu’il croyait, si, la mort de cet homme l’impactait, et que, il n’était pas aussi dur qu’il le croyait. Ces drogues qu’il s’enfilait ne l’insensibilisait pas autant qu’il le pensait. Il n’avait cependant pas l’intention de révéler à cette machine ce qu’il se passait dans sa caboche. Il restait persuadé qu’elle était là pour justement voir ce qu’il s’y passait, dans sa tête. « Je n’en doute pas, que tu n’ai fait qu’obéir aux ordres. N’est-ce pas ce que nous faisons tous ? » Il eut un sourire sarcastique. « Excepté ce type, va savoir à qui il obéissait… mais ça, nous ne le saurons jamais. » Aux dernières nouvelles les puces ne téléchargeaient pas encore les pensées sur un disque dur… Les secrets de Pinxit seraient bien gardés, encore une fois.

fin

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